Les traductions catholiques et protestantes
du Nouveau Testament
concordent-elles?

Réponse à une question brûlante à l'heure œcuménique

 

de Robert Schrœder
Avec autorisation 04/2003

 


 

Liste des traductions comparées - Bibliographie

(Entre parenthèses, les abréviations utilisées.)

I. BIBLES ET NOUVEAUX TESTAMENTS

1. TRADUCTIONS CATHOLIQUES

Versions catholiques récentes (postérieures à la première édition de cette étude)

2. TRADUCTIONS PROTESTANTES

Versions protestantes récentes (postérieures à la première édition de cette étude)

 

2.3. TRADUCTIONS INTERCONFESSIONNELLES

par des équipes comptant des traducteurs catholiques, orthodoxes et protestants

 

2.4. TRADUCTION Chouraqui   

La Bible traduite par André Chouraqui, écrivain juif, qui a repensé les textes grecs dans leur contexte culturel araméen et hébreu. On peut penser qu'il n'a pas été influencé, dans sa traduction, par aucun a priori théologique catholique ou protestant. Desclée de Brouwer, Paris 1974-79 et 1985 (CHO).

 


 

II. BIBLIOGRAPHIE: exclusivement catholique.

 

Notre bibliographie est volontairement restreinte, la Bible étant en la circonstance, le document par excellence. Il est conseillé au lecteur intéressé de suivre l'exemple des Juifs de Bérée qui

« examinaient chaque jour les Ecritures. pour voir si ce qu'on leur disait était exact.» (Act. 17.11).1

 


Avant-propos

Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité. (1 Tim. 2.4)

Le Concile œcuménique a amené l'auteur de ces lignes à approfondir ce qui lui semblait être le fondement doctrinal de l'Unité chrétienne: la Bible, et en particulier le Nouveau Testament qui est la révélation définitive de Dieu aux hommes.

« Sous l'inspiration de l'Esprit-Saint, écrivit S. S. Pie XII (Divino afflante) , les écrivains sacrés ont composé les Livres que Dieu a voulu donner au genre humain »
(cité par Daniel-Rops, « Qu'est-ce que la Bible? », p. 68).

Ce sont donc ces livres qui nous révèlent Ses desseins et Son plan de Salut pour l'humanité.

Pour connaître Sa volonté, « pour entendre le Saint-Esprit, il faut lire un livre écrit de main d'homme » (Dom Passelecq, « Préj. des Cath. contre la lecture de la Bible », p. 12), mais « divinement inspiré » (2 Tim. 3.16), l'inspiration étant l'impulsion surnaturelle par laquelle l'Esprit-Saint a incité les écrivains sacrés à écrire sous sa continuelle assistance. « Puisque l'écrivain sacré a écrit tout ce que Dieu voulait lui faire écrire et seulement ce qu'il voulait lui faire écrire, il en résulte que dans les livres inspirés tout est parole de Dieu » (Robert-Tricot, « Init. Bibl. », p. 20)

« ... en sorte que toute erreur, même en matière qui ne regarde pas la foi ou les mœurs, se trouve être exclue de la Sainte Ecriture, parce que Dieu ne saurait enseigner une erreur quelconque »
(L. Rudloff, « Pet. Théol. Dogm. », p. 30).

Tel est l'énoncé du principe de l'inerrance des Ecritures.

« Ce qui est certain, c'est que cette assistance (celle du Saint-Esprit) fait choisir à l'auteur les mots les plus aptes à rendre la pensée divine dans toute sa force et sa netteté. En ce sens, on peut parler d'inspiration verbale »
(Robert-Tricot, Init. Bibl. p. 17).

En effet, « Il est difficile de dissocier la pensée pure de son expression. Dieu ne saurait être absent de la formulation, de la mise par écrit de son message » (Daniel-Rops, « Qu'est-ce que la Bible? », p. 78). Tel est l'énoncé du principe de « l' inspiration totale. »

Puisque Dieu est l'Auteur de la Bible, sa lecture ne reste pas sans action profonde sur son lecteur.

« La Parole de Dieu réalise sans intermédiaire ce dont elle est le signe. 'Comme la pluie et la neige descendent du ciel et n'y retournent pas qu'elles n'aient abreuvé et fécondé la terre et qu'elles ne l'aient fait germer, qu'elles n'aient donné la semence au semeur et le pain à celui qui mange, ainsi en est-il de ma Parole qui sort de ma bouche. Elle ne revient pas à moi sans effet, mais elle exécute ce que j'ai voulu et accomplit ce pourquoi je l'ai envoyée' (Is. ou Es. 55. 10, 11) ».
(J. Vallentin, La Foi des Chrétiens p. 36).

De plus,

« la Parole de Dieu nous sanctifie. Elle est la voie du salut, car elle opère la sanctification et la grâce » (J. Vallentin, « La Foi des Chrétiens », p. 37).

Voir aussi Jean 17.17.

« La Parole de Dieu, nous dit le Vocabulaire de Théologie biblique, est donc un fait en face duquel l'homme ne peut se tenir passif; le porte-parole exerce un ministère aux responsabilités très lourdes; l'auditeur est sommé de prendre position et cela engage son destin. »

Méditée dans cette perspective, la Bible ne peut manquer d'enrichir spirituellement, de conduire le lecteur – tout comme elle a conduit l'auteur de ces lignes – à reconnaître en Jésus son seul Sauveur et l'amener à une « nouvelle naissance »2, par laquelle « l'homme échange sa vie humaine et pécheresse pénétrée de tristesse et aboutissant à la mort, contre une vie divine, éternelle et bienheureuse. Il devient participant de la vie même de Dieu » (Cahier Evangile, n° 41, p. 11). Le message du Nouveau Testament est cette Bonne Nouvelle:

« A cause de ce que Dieu fit en Jésus et par lui, les hommes sont pardonnés, réconfortés et ramenés à l'intimité avec Dieu. Dieu et les hommes sont à nouveau réunis »
(R. Davidson, « Le Mes. de la Bible », p. 153).

L'unité entre chrétiens ne peut passer que par la communion avec le Père et le Fils.

« Que tous soient un. Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient un en nous »
(Jean 17.21, Jérusalem).

C'est la prière même de Jésus. Voir aussi Gal. 3. 28.

L'unité, c'est qu'il n'y ait qu'

« un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême. un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, et parmi tous, et en tous » (Eph. 4.5, 6).

Or cette foi unique est-elle prêchée pareillement dans toutes les églises? Propose-t-on aux hommes avides de vie nouvelle et assoiffés de certitudes spirituelles le même Evangile et le même texte?

La comparaison des traductions récentes du Nouveau Testament et leur confrontation avec l'original grec (N. T. Gr. Lat.) se sont imposées.

En cas de divergence, c'est le principe de l' « analogie de la foi » (Rom. 12.6) qui doit trancher. « Il faut comparer les passages parallèles et les expliquer les uns par les autres; ce sera souvent le meilleur moyen de préciser une expression ou d'envisager un fait sous ses divers aspects » (Robert-Tricot, « Init. bibl. », p. 327)3.

Mais la Bible étant le livre de la Parole de Dieu, il faut l'aborder avec respect, foi et humilité, avec un cœur et un esprit ouverts.

Et avant de commencer la lecture de cette étude, il faut demander à l'Esprit-Saint d'être notre guide et notre lumière:

« Eternel ! fais-moi connaître tes voies,
Enseigne-moi tes sentiers.
Conduis-moi dans ta vérité, et instruis-moi;
Car tu es le Dieu de mon salut,
Tu es toujours mon espérance... »
(Ps. 25 (24).4, 5).


Jésus-Christ et son salut

Si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé. (Jean 10. 9)

 

La Bible nous fait connaître le plan de Dieu pour le salut de l'humanité. Et, pourtant, les diverses Eglises n'enseignent pas la même doctrine de salut. Bien plus, comme nous allons le voir dans les passages suivants, les traducteurs ne traduisent pas toujours en fonction du texte grec, mais en fonction d'une certaine orientation théologique de leur esprit. De là les divergences de traduction en plusieurs endroits.

Actes 2.47

Voici le premier, tel que le traduisent les protestants. Il s'agit d'un passage des Actes des Apôtres. chapitre 2, verset 47

SEGOND

Et le Seigneur ajoutait chaque jour à l'Eglise ceux qui étaient sauvés.

DARBY

... ceux qui devaient être sauvés.

GOGUEL-MONNIER

... ceux qui étaient sauvés.

SEGOND REV.

... ceux qui étaient sauvés.

STAPFER

... ceux qui étaient sauvés.

SYNODALE

... ceux qui étaient sauvés.

PV

... ceux qui étaient sauvés.

PLE

... ceux qui étaient sauvés.

LIV

... ceux qui étaient sauvés.

BAN

... ceux qui étaient sauvés.

 Voici maintenant les traductions catholiques

BUZY

... ceux qui étaient sur le chemin du salut.

CRAMPON 1939

... ceux qui étaient sauvés.

CRAMPON 1960

... ceux qui étaient sauvés.

JÉRUSALEM

... ceux qui seraient sauvés.

N. T. LETOUZEY

... ajoutait-il chaque jour des élus.

MAREDSOUS

... ceux qui étaient sur le chemin du salut.

PIROT -CLAMER

... ajoutait chaque jour les sauvés.

OSTY-TRINQUET

... ceux qui étaient sauvés.

TRI

... ceux qui étaient sauvés.

PDB

... ceux qui trouvent le salut.

  Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

... ceux qui trouvent le salut.

BFC

... ceux qui étaient sauvés.

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

pour nous, les sauvés

 

Ici, la traduction diverge sur le mot grec sôzomenous qui signifie littéralement les étant sauvés, donc bien ceux qui sont sauvés et non pas seulement ceux qui se trouvaient sur le chemin du salut. Pirot-Clamer précise dans sa note (tome XI, 1ère partie p.69): « Les sauvés: la traduction de la Vulgate qui salvi fierunt (qui font leur salut) ne rend pas le grec tous sôzomenous. »

Les traduction Buzy, Jérusalem et Maredsous sont donc à rejeter.

1 Cor. 1.18

Nous retrouvons des divergences analogues en 1 Cor. 1.18.

Voici d'abord les traductions protestantes:

SEGOND

Car la prédication de la croix est une folie pour ceux qui périssent; mais pour nous qui sommes sauvés, elle est une puissance de Dieu.

DARBY

... nous qui obtenons le salut.

GOGUEL-MONNIER

... nous qui sommes sauvés.

SEGOND REV.

... nous qui sommes sauvés.

STAPFER

... pour nous, les sauvés.

SYNODALE

... nous qui sommes sauvés.

PV

... qui marchons dans la voie du salut.

COL

... pour nous qui sommes sauvés

PLE

... pour nous qui sommes sauvés

LIV

... pour nous qui sommes sauvés

BAN

... pour nous qui sommes sauvés

 

 Voici maintenant les traductions catholiques, avec leurs commentaires 4

BUZY

... pour ceux qui sont dans la voie du salut.

CRAMPON 1939

... pour nous qui sommes sauvés.

CRAMPON 1960

... pour ceux qui se sauvent.

JÉRUSALEM

... pour ceux qui se sauvent.

N. T. LETOUZEY

... pour ceux qui se sauvent.

MAREDSOUS

... pour ceux qui sont sauvés.

Note :
Au contraire, pour ceux qui ont fa foi, sont baptisés (et donc sauvés), ce message est une force divine parce qu'il met le fidèle en présence du Christ... Le fidèle est intérieurement transformé par l'influence du Christ qui habite en lui par son Esprit-Saint. 

PIROT -CLAMER

... pour ceux qui se sauvent.

OSTY-TRINQUET

... pour ceux qui se sauvent.

TRI

... ceux qui se sauvent

PDB

... ceux qui sont en train d'être sauvés

  Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

... ceux qui sont en train d'être sauvés

BFC

... nous qui sommes sur la voie du salut

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

pour nous, les sauvés

 

On trouve ici, le mot « sôzomenois », le même que tout à l'heure (mais au datif) et signifiant « les étant sauvés ». Crampon 1939 et Maredsous seuls ont traduit correctement.

Voici maintenant un troisième passage où apparaissent encore des divergences de traduction. Il s'agit de 1 Cor. 15.2.

1 Cor. 15.2

Voici d'abord les traductions protestantes:

SEGOND

(Je vous rappelle, frère, l'Evangile que je vous ai annoncé, que vous avez reçu, dans lequel vous avez persévéré), et par lequel vous êtes sauvés, si vous le retenez tel que je vous l'ai annoncé; autrement vous auriez cru en vain.

DARBY

... vous êtes sauvés.

GOGUEL-MONNIER

... il (l'Evangile) sera l'instrument de votre salut.

SEGOND REV.

... vous êtes sauvés.

STAPFER

... et qui aussi vous sauvera.

SYNODALE

... vous êtes sauvés.

PV

... elle aussi sera l'instrument de votre salut.

PLE

... par lequel vous êtes sauvés.

LIV

... cette bonne nouvelle qui vous sauve

BAN

... par lequel aussi vous êtes sauvés.

Voici maintenant les traductions catholiques:

BUZY

... vous serez sauvés

CRAMPON 1939

... vous êtes sauvés

CRAMPON 1960

... vous serez sauvés

JÉRUSALEM

... vous serez sauvés

N. T. LETOUZEY

... vous serez sauvés

MAREDSOUS

... vous serez sauvés

PIROT -CLAMER

... vous serez sauvés

OSTY-TRINQUET

... vous serez sauvés

TRI

... vous serez sauvés

PDB

... vous êtes sauvés

OSTR

... vous êtes sauvés
L'ancienne édition portait : vous serez sauvés.

Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

... vous serez sauvés

BFC

... vous êtes sauvés

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

... vous serez sauvés

Ici les protestants traduisent généralement par un présent, alors que les catholiques, à l'exception de Crampon 1939, traduisent par un futur. Or le mot en question, sôzesthe est bien le présent de la voix passive du verbe sôzo.

Pour justifier leur traduction, les commentateurs de Pirot-Clamer notent (tome XI, 2ème partie, p, 277): « Le verbe sôzesthe au présent doit être interprété comme un hébraïsme, mis pour le futur ».

Toutefois, l'apôtre Paul « manie le grec avec aisance » (Chaîne-Grousset, lit. relig., p. 418). De plus, il a bénéficié de l'inspiration divine lorsqu'il écrivait ou dictait ses lettres.

2 Cor. 2.15

Enfin, un dernier passage présente des divergences de traduction du même ordre. Il s'agit de 2 Cor. 2.15.

Voici d'abord les traductions protestantes:

SEGOND

Nous sommes, en effet, pour Dieu la bonne odeur de Christ, parmi ceux qui sont sauvés et parmi ceux qui périssent:

DARBY

... qui sont sauvés.

GOGUEL-MONNIER

... qui sont sauvés.

SEGOND REV.

... qui sont sauvés.

STAPFER

... qui sont sauvés.

SYNODALE

... qui sont sauvés.

PV

... ceux qui se laissent sauver

COL

... ceux qui se sauvent

PLE

... ceux qui sont sauvés

LIV

... ceux qui sont sauvés

BAN

... ceux qui sont sauvés

Voici maintenant les traductions catholiques:

BUZY

... vous serez sauvés

CRAMPON 1939

... vous êtes sauvés

CRAMPON 1960

... vous serez sauvés

JÉRUSALEM

... vous serez sauvés

N. T. LETOUZEY

... vous serez sauvés

MAREDSOUS

... vous serez sauvés

PIROT -CLAMER

... vous serez sauvés

OSTY-TRINQUET

... vous serez sauvés

TRI

... ceux qui se sauvent

PDB

... ceux qui se sauvent

Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

... ceux qui se sauvent

BFC

... ceux qui se sauvent

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

parmi les sauvés

Ici les protestants utilisent le présent de la voix passive, alors que les catholiques, à l'exception de Crampon 1939, utilisent le présent de la voix active.

En fait, le mot mal traduit est encore « sôzomenois », déjà rencontré en Actes 2.47 et 1 Cor. 1.18 et qu'il faut traduire par « les étant sauvés ».

Il est assez surprenant de constater que Crampon 1960 a modifié Crampon 1939, mais non pas dans le sens d'une plus grande fidélité au texte!

PART DE L'HOMME DANS SON SALUT

Cette divergence des traductions pose deux questions fondamentales pour le salut des chrétiens. Et tout d'abord celle-ci: quelle est la part de l'homme dans son salut? Peut-il se sauver lui-même? Ensuite la seconde question: le chrétien peut-il avoir la certitude, dès ici-bas, d'être sauvé?

La réponse est donnée par le Nouveau Testament.

Lorsque les apôtres lui demandèrent qui pouvait être sauvé, Jésus a répondu:

« Aux hommes cela est impossible, mais à Dieu tout est possible » (Matth. 19.26)5.

Pierre le redit en Actes 15.11 :

« Mais c'est par la grâce du Seigneur Jésus que nous croyons être sauvés, de la même manière qu'eux. »

Et Paul le réaffirme en maints endroits. Voyons deux passages particulièrement significatifs.

Tite 3.5:
Il nous a sauvés, non à cause des œuvres de justice que nous aurions faites, mais selon sa miséricorde, par le baptême de la régénération et le renouvellement du Saint-Esprit.

Eph. 2.8 et 9:
Car c'est bien gratuitement que vous êtes sauvés moyennant la foi: vos mérites n'y sont pour rien, c'est un don de Dieu; ce n'est pas par les œuvres, en sorte que personne n'ait sujet d'en tirer vanité (Maredsous).

Voir aussi Rom. 3.28 ; 8.1 ; 9.32 et 33 ; 11.6 ; 1 Cor. 6.20 : Gal. 2.16; 2 Tim. 1.9.

Il est donc évident que ce ne sont point nos œuvres qui peuvent nous sauver. Jésus lui-même n'a-t-il pas dit:

« Vous de même, quand vous avez fait tout ce qui vous a été ordonné, dites: Nous sommes des serviteurs inutiles, nous avons fait ce que nous devions faire » (Luc 17.10)?

L'adjectif « akhreios » traduit par « inutiles » ou « pauvres » ou « ordinaires », signifie même « bons à rien », et, pour le traducteur catholique Henri Lasserre (Les saints Evangiles, p. 572), « sans mérite », donc nullement surérogatoire. 

« L'homme ne peut sortir de sa condition de pécheur que par la foi en Jésus-Christ, lequel a reçu de Dieu mission de réparer le désastre causé par le péché d'Adam: expier les fautes de l'humanité, abattre la tyrannie du péché et conférer aux croyants sa sainteté, qui est la sainteté même de Dieu »
(Osty-Trinquet, note à Rom. 1.17, p. 321).

L'ASSURANCE DU SALUT

Bien plus, les versets précédents laissent présumer que les apôtres et les premiers chrétiens possédaient la certitude d'être sauvés. « Il nous a sauvés », « vous êtes sauvés », « nous croyons être sauvés » : voici ce qu'affirment les apôtres!

Cette gratuité et cette certitude du salut constituent précisément la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ! Tout au long du Nouveau Testament, cette affirmation se retrouve. Voici deux témoignages de l'apôtre Jean.

Jean 6.47:
En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi a la vie éternelle.

1 Jean 5.11 à 13:
Et voici ce témoignage, c'est que Dieu nous a donné la vie éternelle, et que cette vie est dans son Fils. Celui qui a le Fils a la vie; celui qui n'a pas le Fils de Dieu, n'a pas la vie. Je vous ai écrit ces choses, afin que vous sachiez que vous avez la vie éternelle, vous qui croyez au nom du Fils de Dieu.

Voir aussi Jean 3.15 et 16; 3.36; 5.24; 10.28; Rom. 6.22; 8.1 ; 10.9 à 11 ; 1 Jean 2.25; 3.14; Phil. 3.20.

Le salut vient donc de Dieu, et le chrétien racheté possède la certitude de son salut.

Mais alors, peut-on objecter, à quoi bon les nombreuses exhortations aux bonnes œuvres? (Eph. 2.10; 1 Tim. 6.18; Héb. 10.24; 1 Pi. 2.12; Ja. 2.14 et 20, etc.).

Celles-ci n'étant pas les moyens du salut, sont au contraire les fruits du salut, le témoignage des sauvés, car toute foi authentique « témoigne » par ses œuvres.

« Que votre lumière luise aussi devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes œuvres, et qu'ils glorifient votre Père qui est dans les cieux » (Matth. 5.16).

Jésus a dit :

« Je suis le cep, vous êtes les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure porte beaucoup de fruit, car sans moi vous ne pouvez rien faire. » (Jean 15.5).

Sans communion avec Dieu, en effet, toutes nos œuvres sont mortes.

LA REPENTANCE

Comment obtenir ce salut? Comment aller vers Jésus qui proclame:

« Je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi » (Jean 6. 37).

Il nous le dit lui-même:

« Repentez-vous et croyez à la bonne nouvelle » (Marc 1.15).

« Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé » (Marc 16.16).

Tout au long du Nouveau Testament reviennent ces exhortations à la foi et à la repentance qui en constituent l'essence (voir Actes 20.21).

« Si vous ne vous repentez, vous périrez tous également » (Luc 13.3 et 5).

Avant son ascension au ciel, Jésus explique de nouveau à ses disciples que, selon les Ecritures, « la repentance et le pardon des péchés seraient prêchés en son nom » (Luc 24.47).

Dès sa première prédication, Pierre exhorte à la repentance (Actes 2.38). Devant les Athéniens, Paul proclame que « Dieu, sans tenir compte des temps d'ignorance, annonce maintenant à tous les hommes, en tous lieux, qu'ils aient à se repentir » (Actes 17.30).

Et le dernier livre de la Bible nous fait entendre plusieurs fois le même avertissement. Ecoutons :

« Aie donc du zèle, et repens-toi. Voici, je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi » (Apoc. 3.19 et 20).

Qu'est-ce donc que la repentance? Qu'est-ce se repentir? Les correspondants grecs de ces mots sont metanoïa et metanoeô. Ils expriment, comme le dit la note de Jérusalem à Matth. 3.2, un changement de l'esprit, un retournement (conversion).

Mareds. Expl. précise très justement, dans son commentaire à Actes 2.38, que l'expression: repentez-vous,

« contient, outre le regret de ses fautes, une disposition réelle à un changement de vie, à un renouvellement de la mentalité... ».

Comment se traduit ce repentir? Jésus nous l'enseigne dans sa parabole de l'enfant prodigue (Luc 15.18 à 20) :

« Je me lèverai, j'irai vers mon père, et je lui dirai: Mon père, j'ai péché contre le ciel et toi, je ne suis plus digne d'être appelé ton fils; traite-moi comme l'un de tes mercenaires. Et il se leva, et il alla vers son père ».

L'Evangile nous donne aussi des exemples de repentir. D'abord, la femme repentante (Luc 7.38) qui se tint aux pieds de Jésus et pleura. De même Pierre, après son reniement, lorsqu'il rencontra le regard du Seigneur, sortit de là et pleura amèrement (Luc 22. 62).

Le psalmiste déjà, dans ce magnifique psaume de la repentance (Ps. 51 (50). 19) nous dit:

« Les sacrifices qui sont agréables à Dieu, c'est un esprit brisé: ô Dieu! tu ne dédaignes pas un cœur brisé et contrit. »

Et ainsi parle le Très-Haut (Esaïe ou Isaïe 57.15) :

« ... Mais je suis avec l'homme contrit et humilié, afin de ranimer les esprits humiliés, afin de ranimer les cœurs contrits. »

REPENTANCE ET PENITENCE

Or, si la repentance est un changement de conduite et un retour vers Dieu, il ne faut pas confondre « repentance » et « pénitence ». Car le mot « pénitence », outre l'idée de repentir, contient la notion d'expiation des péchés et celle des pratiques expiatoires de mortifications.

Dès 1886, Henri Lasserre, traducteur catholique des Evangiles, l'avait reconnu (Les Saints Evangiles, p. 536) :

« Le paenitentiam agite du latin ne traduit pas exactement les sens du grec metanoeïte qui veut dire: changez de sentiment, repentez-vous, convertissez-vous, mais qui ne comporte point, comme le paenltentiam agite, l'idée d'austérités volontaires, dans le but d'expier. »

Le Nouveau Testament nous a appris, en effet, que ce ne sont pas nos œuvres qui peuvent nous sauver, que le salut est impossible à l'homme et que c'est Jésus-Christ qui, à notre place, s'est livré pour l'expiation de nos péchés (1 Jean 4,10 ; Rom, 3.25).

Les commentateurs de Pirot-Clamer notent aussi (tome IX, p, 26) :

Metanoeïte (traduction du substrat hébreu sûbû) : étymologiquement, repentez-vous, changez d'esprit (meta nous), changez de sentiments, de conduite. La meilleure traduction des verbes hébreu et grec semble être non pas faites pénitence, repentez-vous qui n'expriment formellement que le regret, mais convertissez-vous qui exprime en même temps le changement de conduite consécutif au repentir. »

Et pourtant, le mot pénitence et l'expression faites pénitence reviennent souvent sous la plume des traducteurs catholiques, dans les missels et la catéchèse catholique.

Voici d'ailleurs un tableau comparatif (p. 24-25) des diverses traductions des mêmes mots grecs: metanoïa et metanoeô que tous les traducteurs protestants traduisent toujours par repentir ) (sous ses diverses formes) ou par repentance, aux exceptions suivantes près.

 

Osty-Trinquet est la seule traduction catholique à toujours traduire ces mots par repentir et ses dérivés.

 

Héb. 6.1

renoncement aux œuvres mortes

Segond, Darby, Goguel-Monnier, Segond rev., Stapfer

Luc 13. 3,5
Act. 20.211

convertir

Goguel-Monnier

2 Tim. 2.25

changer d'avis

Stapfer

Héb. 12.17

revenir

 


Metanoïa (*) et Metanoeô (•)

Expressions utilisées pour traduire ces mots dans les versions anciennes

 

 versets

 Buzy

Crampon
1939

Crampon
1960

Jéru-
salem

N.T.
Letouzet

Maredsous

Pirot-
Clamer

Osty-
Trinquet

Lasserre

Synopse

 Matth.

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 15.10 •

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 16.30 •

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 17.3 •

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 17.4 •

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 24.47

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 Actes

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 3.19 •

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 5.31 *

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 8.22 •

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 13.24 *

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 26.20 *

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 Héb.

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 6.6 *

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 3.9 *

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 3.19 •

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 16.9 •

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 re

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* = Metanoïa
• = Metanoeô


 

Significations des abréviations

proportions
Total 455

Am

amendement

2

Ch

changer de conduite

5

Co

se convertir, conversion

41

De

se détourner

1

Im

Impénitence

1

FP

faire pénitence

65

PE

pénitence

63

Re

repentir, se repentir, repentance

256

Rg

regretter

3

Rt

retour à Dieu

3

Rn

renoncer

3

Rv

revenir

1

Expressions utilisées pour traduire ces mots dans les versions récentes

 

 PV

repentir, repentance, se détourner des péchés, se tourner vers Dieu; changer de mentalité, d'avis, d'attitude, de vie; revenir sur le choix, se convertir, répudier les agissements

PLE

se convertir, conversion, changement

COL

se repentir, repentance, changer d'avis

LIV

se détourner du péché, de sa méchanceté, de ses idées fausses, de son indifférence; revoir sa position et son attitude vis-à-vis de Dieu; se repentir, se tourner vers Dieu; se débarrasser des idôles; renoncer au péché et se tourner vers Dieu; abandonner les péchés et se tourner vers Dieu; reprendre son comportement et ses pensées; changer de pensées, d'attitude, de comportement

BAN

se repentir, repentance, changer d'idée (1 fois)

TRI

se repentir, se convertir, (1 fois); la repentance (1 fois); conversion (1 fois); faire pénitence (6 fois)

PDB

changer; changer de cœur, de conduite; transformation des cœurs; renoncement à la méchanceté; se repentir; s'amender; revenir sur sa décision; revenir; faire pénitence (2 fois)

OSTR

repentir; repentance; conversion (1 fois)

 

 

TOB

se convertir; se repentir; conversion

BFC

changer de comportement; commencer une vie nouvelle; regretter; se détourner

 

 

CHO

faire retour

 

S'il est vrai que le signe de la repentance, dans l'Ancienne Alliance, était « la cendre et le sac » (Matth. 11.21), le « jeûne » (Joël 2.12) et la « tête rasée » (Es. ou Is. 22. 12), Jésus est venu inaugurer le culte « en esprit et en vérité » (Jean 4. 23 et 24). Aussi, le jeûne doit-il rester secret (Matth. 6.16 et 17) ; et dans la parabole du pharisien et du publicain (Luc 18.10 à 14), Jésus ne nous apprend-il pas quelle doit être attitude du pécheur repentant? Déjà Esaïe (ou Isaïe), parlant au nom de l'Eternel, disait: (ch. 58, v. 6 et 7) :

« Voici le jeûne auquel je prends plaisir:
Détache les chaînes de la méchanceté,
Dénoue les liens de la servitude,
Renvoie libres les opprimés,
Et que l'on rompe toute espèce de joug;
Partage ton pain avec celui qui a faim,
Et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile; Si tu vois un homme nu, couvre-le
Et ne te détourne pas de ton semblable. »

La repentance doit donc être toute intérieure; elle signifie quitter le mal et se tourner résolument, définitivement vers Dieu et ses enseignements.

« Je vous le dis en vérité, nous dit Jésus, si vous ne vous convertissez et si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux » (Matth. 18.3).

Tel un enfant qui n'attend rien de lui-même, nous nous tournons confiants vers le Dieu miséricordieux, afin que nos péchés soient effacés.

« Repentez-vous donc et convertissez-vous, dit Pierre aux Israélites rassemblés au portique de Salomon, pour que vos péchés soient effacés » (Actes 3.19).

Quand nous nous sommes décidés d'accepter Jésus-Christ comme notre Sauveur et Maître, nous obtenons, en effet, le pardon de nos péchés et la réconciliation avec Dieu, que Jésus nous a mérités par sa mort (Col. 1. 21 et 22).

LA NOUVELLE NAISSANCE

Nous sommes alors « régénérés » par Dieu (1 Pi. 1.3) et « nés de nouveau »,

« Si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu. » (Jean 3.3).

Cette nouvelle naissance est la naissance à l'Esprit et qui nous transforme radicalement 6! Elle est absolument nécessaire, puisque Jésus insiste auprès de Nicodème:

« Il faut que vous naissiez de nouveau. » (Jean 3.7).

Par la nouvelle naissance, Jésus prend possession de notre vie. Mais cela n'est possible que dans la mesure où nous avons abdiqué à notre moi, où nous nous sommes détournés de nous-mêmes et où nous avons crucifié notre moi (Gal. 5.24) pour recevoir Jésus en qui nous mettons toute notre confiance.

« A ceux qui l'ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle (la Parole) a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu » (Jean 1.12).

Celui qui est né de nouveau possède l'assurance du salut.

« L'Esprit lui-même atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu » (Rom. 8.16; Maredsous).

Nous avons la certitude d'être le « temple du Saint-Esprit » (1 Cor. 6.19).

Le thème de la nouvelle naissance est au centre du message du Nouveau Testament. « En lisant ce cahier » – pouvons-nous lire (p. 8) dans le N° 43 des Cahiers « Evangile » de la Ligue Catholique de l'Evangile, – consacré à la nouvelle naissance « vous allez donc voir la 'catholicité', l'universalité, de l'enseignement sur la nouvelle naissance, sur le changement radical que Dieu veut opérer dans l'esprit, dans le cœur, dans l'être le plus profond des siens ».

Si Paul a parlé de « nouvelle création » (2 Cor. 5.17; Gal. 6.15), si Pierre parle de « régénération » (1 Pi. 1.3, 23), si Jacques parle d'un « engendrement par la Parole de vérité » (Ja. 1.18), si Jean parle d'une « nouvelle naissance » (Jean 3.3, 7), ils ne font qu'expliciter l'enseignement de Jésus qui a dit:

« Je suis la vie » (Jean 11.25; 14.6).

Paul proclame (2 Cor. 5.17) :

« Si quelqu'un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées; voici, toutes choses sont devenues nouvelles. »

Régénérés par la grâce de Dieu, nous pouvons nous écrier avec l'apôtre Paul: « Je puis tout par celui qui me fortifie » (Phil. 4.13). La victoire sur le péché m'est assurée (1 Cor. 15.57), car

« ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ qui vit en moi » (Gal. 2. 20).

Puisse, cher lecteur, cette vie divine demeurer en vous!

Puissiez-vous dire, avec l'apôtre Paul:

« Christ est ma vie »

(Phil. 1.21). Sinon, nous faisons nôtre sa supplication (2 Cor. 5.20) :

« Soyez réconciliés avec Dieu ! »

 


Jésus-Christ et son Eglise

Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d'eux. (Matth. 18.20)

LES ANCIENS OU PRESBYTRES

On trouve dans le Nouveau Testament 48 fois le mot grec presbyteros.

Vingt-neuf fois. il désigne les Anciens des Juifs, et le mot a été unanimement traduit par ancien.

Dans son glossaire, Segond Rev. précise que

« pour les Juifs, ce mot désignait des docteurs ou des chefs de famille qui avaient une autorité dans la vie religieuse et dans les communautés juives ».

Osty-Trinquet ajoutent (notes de Marc 7.3 et Luc 7.3)

« que ces anciens, docteurs célèbres. transmettaient et complétaient l'enseignement oral destiné à interpréter la Loi et qu'ils siégeaient dans les assemblées locales et les tribunaux ».

Mareds. Expl. précise qu'ils étalent encore « membres du Grand Conseil (sanhédrin) ».

C'est ainsi, en effet qu'ils apparaissent dans les passages suivants ainsi que dans l'Ancien Testament (Lév. 4.13 à 16; Nomb. 11.16; Deut. 19.12; 27.1 ; 1 Rois 8.1).

Matth. 15. 2, 16.21, 21.23, 26.3, 26.57, 27.1, 27.3, 27.12, 27.41, 28.12
Marc 7.3, 8.31, 11.27, 14.43, 14.53, 15.1
Luc 7.3, 9.22, 20.1, 22.1, 22.52
Actes 4.5, 4.8, 4.23, 6.12, 22.5, 23.14, 24.1, 25.15
Héb. 11.2

Mais le terme presbyteros est encore utilisé dans le Nouveau Testament 19 fois pour désigner ceux qui sont chargés de diriger les Eglises ou assemblées chrétiennes. Les traducteurs protestants ont toujours traduit ce mot par ancien.

Dans les 10 passages suivants des Actes, les traducteurs catholiques aussi l'ont traduit par ancien. Toutefois, Buzy, N. T. Letouzey et Pirot-Clamer ont francisé le mot grec presbyteros en presbytre.

Actes 11.30, 14.23, 15.2, 15.4, 15.6, 15.22, 15.23, 16.4, 20.17, 21.18

Il n'en est plus de même dans les épîtres, où les traducteurs catholiques utilisent non seulement les mots anciens ou presbytres mais aussi celui de prêtre, comme le montre le tableau ci-contre.

 versets

 Buzy

Crampon
1939

Crampon
1960

Jérusalem

N.T. Letouzet

Maredsous

Pirot-
Clamer

Osty
trinquet

1Tim. 4.14

Presbytre

Ancien

Ancien

Presbytre

Presbytérium

Ancien

Presbytérium

Collège persbytérial

1Tim. 5.17

Presbytre-
Présidents

Ancien

Ancien

Presbytre

Presbytre

Ancien

Presbytre

Ancien

1Tim. 5.19

Presbytre

Ancien

Ancien

Presbytre

Presbytre

Ancien

Presbytre

Ancien

Tite 1.5

Presbytre

Ancien

 Presbytre

Presbytre

Presbytre

Ancien

Presbytre

Ancien

Ja. 5.14

Presbytre

PRÊTRE

Ancien

Presbytre

Presbytre

PRÊTRE

Presbytre

Ancien

1 Pi. 5.1

Presbytre

Ancien

Ancien

Ancien

Presbytre

Ancien

Presbytre

Ancien

1 Pi. 5.5

Presbytre

Ancien

Ancien

Ancien

Presbytre

Ancien

Presbytre

Ancien

2 Jean 1

Presbytre

Ancien

Ancien

Ancien

Presbytre

Ancien

Presbytre

Ancien

3 Jean 1

Presbytre

Ancien

Ancien

Ancien

Presbytre

Ancien

Presbytre

Ancien

On peut se demander pour quelles raisons, autre qu'une doctrine ecclésiologique préconçue, un traducteur a pu être amené à adopter un mot différent, selon les épîtres, alors que les apôtres, eux, utilisaient toujours le même mot...

Quelle est donc la signification réelle du mot presbyteros dans l'Eglise primitive?

Mareds. Expl. (en note à Actes 11.30) nous apprend que le terme d'ancien « fut adopté par les chrétiens de Jérusalem pour désigner les administrateurs de la communauté, sous la direction des apôtres ». Osty-Trinquet disent même: « sous l'autorité supérieure des apôtres ». En note à Actes 14.23 Mareds. Expl. précise qu'il s'agit « des évêques et des prêtres qui présidaient les communautés ». La même précision est donnée par Osty-Trinquet en note à 1 Pi. 5. 1 : prêtres ou évêques.

Pour Buzy, qui traduit toujours presbyteros par presbytre, ce « devaient être des prêtres; peut-être avaient-ils aussi la plénitude du sacerdoce par l'épiscopat » (Note à Actes 14.23).

Cependant Crampon 1939 et Maredsous traduisent en Jacq. 5.14 ce mot par prêtre... La note de Maredsous précise : « ... Un même mot grec signifie ancien et prêtre ». Et dans plusieurs notes des traducteurs catholiques, le mot ancien est remplacé par prêtre.

En note à 1 Tim. 4.14 Mareds. Expl. précise « que le mot Ancien Ancien est la traduction du terme grec presbyteros, d'où est venu le mot français prêtre.

Mais si l'étymologie du mot prêtre procède de presbyteros, il n'est pas permis de faire dériver les prêtres des presbytres; en effet, le mot latin qui désigne le prêtre est sacerdos et celui qui désigne les anciens est seniores ou presbyteri, Ce n'est donc que secondairement, et tardivement, que presbytre a donné prêtre.

LES PRESBYTRES ET LES EPISCOPES

Ainsi deux questions se posent:

La réponse se trouve dans deux textes du Nouveau Testament. D'abord dans les Actes 20.17 à 28.

V. 17: « Cependant, de Milet Paul envoya chercher à Ephèse les Anciens de l'Eglise. » (Puis il leur dit: « ...)

V. 28: « Prenez donc garde à vous-même, et à tout le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous a établis évêques, pour paître l'Eglise du Seigneur, qu'il s'est acquise par son propre sang. »

Il est évident ici que Ancien (presbyteros) v. 17 et Evêque (episcopos) v. 28 sont synonymes.

Un deuxième texte confirme cette synonymie: Tite 1.5 à 7.

« Je t'ai laissé en Crète, afin que tu mettes en ordre ce qui reste à régler, et que, selon mes instructions, tu établisses des anciens dans chaque ville, s'il s'y trouve quelque homme irréprochable, mari d'une seule femme, ayant des enfants fidèles, qui ne soient ni accusés de débauche ni rebelles. Car il faut que l'évêque soit irréprochable, comme économe de Dieu; qu'il ne soit ni arrogant, ni colère, ni adonné au vin, ni violent, ni porté à un gain déshonnête. »

Le mot episcopos, traduit par évêque ou épiscope ou surveillant, se retrouve encore en Phil. 1.1 et en 1Tim. 3.1 et 2. En 1Pi. 2.25, il s'applique à Jésus.

La synonymie entre épiscope et presbytre est reconnue par Buzy qui note à propos d'Actes 20.17 à 28:

« Les presbytres sont maintenant qualifiés d'épiscopes. Ces deux mots et ces deux valeurs sont donc interchangeables. »

Buzy le réaffirme dans ses notes à Tite 1.5 à 7 et surtout à 1 Tim. 3. 1 où il dit:

« une chose acquise aujourd'hui, c'est la synonymie parfaite de ces deux vocables ».

Mareds. Expl. note à ce propos:

« Evêque : la traduction littérale est surveillant. Dans les premiers textes chrétiens il est parfois difficile de distinguer la fonction proprement épiscopale de celle de chef de communauté... » (note à Actes 20. 28).

« ... Sous réserve de mieux informé, nous nous rallions à l'opinion qui voit ici, dans ce terme évêque, un prêtre-chef de communauté. En effet, un passage parallèle à celui-ci, dans la lettre à Tite (1.5), emploie le terme de ancien ou prêtre » (note à 1 Tim. 3.1).

De même, pour Crampon 1960, l'épiscope « n'est pas un évêque au sens actuel du mot, mais un dignitaire de premier rang parmi les prêtres (presbytre ou ancien) ». C'est aussi l'opinion d'Osty-Trinquet (note à Phil. 1. 1) qui reconnaissent l'équivalence presbytre-épiscope dans la note à 1 Tim. 4.14.

Cependant Jérusalem (note à Tite 1. 5) semble faire une distinction entre les deux. On peut y lire:

« ... le titre de presbytre (...) désigne un état, une dignité; celui d'épiscope (...) un office. Les uns et les autres, chefs de communautés locales, sont chargés non seulement de l'administration temporelle, mais de nombreuses fonctions proprement religieuses. Plus tard l'épiscope deviendra l'évêque, chef unique du Collège des prêtres. »

En note à 1 Tim. 5.17, Crampon 1960 livre ces subtilités:

« Les Anciens ou Presbytres: dignitaires distincts des épiscopes encore que les noms soient interchangeables et investis du pouvoir sacerdotal.   »

Pour terminer, ajoutons que les historiens de l'Eglise reconnaissent aussi, pour l'Eglise primitive, la parfaite synonymie de ces deux termes. Pour Clément (1 Cor. 44. 4-5), selon G. Bardy :

(La Théologie de l'Eglise de saint Clément de Rome à saint Irénée, p. 40) « les deux termes épiscope et presbytre ont le même sens et sont interchangeables. La même synonymie se retrouve dans le « Pasteur » d'Hermas qui ne nomme jamais ensemble les épiscopes et les presbytres, mais qui désigne tantôt les uns, tantôt les autres comme les chefs des Eglises. »

LE SACERDOCE CHRÉTIEN

Les commentaires catholiques ne se recouvrent pas et manquent de clarté, car on y décèle la tentative de faire des « presbytres » les ancêtres des prêtres et des épiscopes les ancêtres des évêques, amorce de la hiérarchie catholique alors que ces deux termes sont absolument équivalents. Voici d'autre part une objection extrêmement sérieuse.

Il n'est pas vrai, comme l'affirme Maredsous, que le mot « presbyteros »ait à la fois la signification d' anciens et de prêtre. C'est le mot hiereus qui signifie prêtre (ou sacrificateur) et on le rencontre dans 30 endroits du Nouveau Testament.

Ses dérivés ( hierateuma, hierôsune, hierateia) qui signifient sacerdoce ou prêtrise se trouvent dans les sept passages suivants:

Ces termes s'appliquent d'abord aux prêtres et au sacerdoce de l'Ancienne Alliance où les prêtres étaient les intermédiaires entre les croyants et leur Dieu pour offrir les divers sacrifices. La prêtrise de la Nouvelle Alliance n'est, en fait, mentionnée que cinq fois; mais elle ne caractérise pas les fonctions ni des presbytres, ni des épiscopes, ni des pasteurs, ni des évangélistes, ni des diacres, ni des prophètes, ni des docteurs... mais celles de tous les chrétiens. Voici ces cinq passages.

Ces passages montrent que l'Eglise du Nouveau Testament ne connaît qu'un sacerdoce: celui de tous les rachetés. Cela ressort aussi d'autres passages, tel Rom. 12.1 ; 1 Cor. 3.16; 1 Cor. 6.19.

L'épître aux Hébreux (10.14) nous montre que le sacrifice de Jésus-Christ est le seul sacrifice nécessaire à la nouvelle alliance:

« Car par une seule offrande, il a amené à la perfection pour toujours ceux qui sont sanctifiés. »

La Nouvelle Alliance ne connaît donc pas de sacerdoce hiérarchisé comme l'Ancienne Alliance, car chaque fidèle y est à la fois prêtre et temple de Dieu. Et Jésus-Christ en est le Grand-Prêtre (Héb. 7.26 et 27). Le mot de grand-prêtre ou de souverain sacrificateur se rencontre 22 fois dans le Nouveau Testament; il désigne les Grands-prêtres de l'Ancienne Alliance, et, dans la Nouvelle Alliance, exclusivement l'unique Grand-Prêtre par excellence, Jésus-Christ, dont le sacerdoce ne passe point et ne se transmet point (Héb. 7. 24). Ce verset, cependant, donne aussi lieu à des traductions divergentes.

Hébr. 7.24

Voici d'abord les traductions, protestantes :

SEGOND

Mais lui, parce qu'il demeure éternellement, possède un sacerdoce qui n'est pas transmissible.

DARBY

... a la sacrificature qui ne se transmet pas.
NOTE: qui ne change pas ou intransmissible.

GOGUEL-MONNIER

... un sacerdoce intransmissible.

SEGOND REV.

... le sacerdoce non transmissible.

STAPFER

.. le sacerdoce qui ne se transmet point à d'autres.

SYNODALE

... possède le sacerdoce qui ne se transforme point.

PV

... sacerdoce perpétuel qui ne peut être transmis à personne d'autre.

PLE

... intransmissible

COL

... non transmissible

LIV

... personne d'autre pour le remplacer

BAN

... qui ne passe point à un autre

Voici maintenant les traductions catholiques avec leurs commentaires.

BUZY

... un sacerdoce qui n'a pas de déclin.

CRAMPON 1939

... un sacerdoce qui ne se transmet point.
Note : Qui ne se transmet point. « D'autres », qui n'est pas commutable (Vulgate: éternel). qui ne doit pas être remplacé par un autre.

CRAMPON 1960

... un sacerdoce qui ne se transmet pas.

JÉRUSALEM

... un sacerdoce immuable.

N. T. LETOUZEY

... un sacerdoce qui ne passera pas.

MAREDSOUS

... un sacerdoce perpétuel.

PIROT -CLAMER

... un sacerdoce inaliénable

OSTY-TRINQUET

... un sacerdoce qui ne passe point.

TRI

... qui ne se transmet pas.

PDB

... possèdera pour toujours la dignité de représentant de Dieu

OSTR

... intransmissible (ancienne édition qui ne passe point)

Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

... sacerdoce exclusif
Note en gr. aparabatos, adjectif qui ne se trouve pas ailleurs dans la Bible. Son sens étymologique est : à côté de qui on ne peut marcher.

BFC

sa tâche de prêtre n'a pas à être transmise à quelqu'un d'autre.

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

intransmissible

 

Le mot grec donnant lieu à ces divergences de traduction est aparabatos qui ne se trouve qu'une seule fois dans le Nouveau Testament. Il ne figure pas non plus dans la version grecque de l'Ancien Testament, dite version des Septante (dont la traduction a été commencée vers 250 av. J.-C.)7.

La traduction immuable ne convient pas, le mot grec signifiant immuable est ametathetos, utilisé en Héb. 6. 17 et 18.

La traduction perpétuel ou à perpétuité ne convient pas non plus, car le grec rend ces expressions par diènékès (Héb. 7.3; 10.1 ; 10.12 et 14).

La traduction intransmissible est bonne, car elle est confirmée par le contexte; voir versets 7.21 et 23, puis 10.14.

Il faut rappeler ici, que le sacerdoce de l'Ancienne Alliance connaissait « un seul souverain sacrificateur », Aaron, puis ses successeurs, qui avaient accès, une fois par an, dans le lieu très saint, au jour des expiations (Héb. 9.7 ; Lév. 16.32, 34). Or Jésus est « venu changer ce sacerdoce » (Héb. 7.12), car il est

« sacrificateur pour toujours, selon l'ordre de Melchisédek » (Héb. 7.20)

et non selon l'ordre d'Aaron (Héb. 7.11).

C'est pourquoi, son sacerdoce ne peut se transmettre. Tout sacerdoce devient superflu,

« car par une seule offrande, il a amené à la perfection pour toujours ceux qui sont sanctifiés » (Héb. 10.14).

Le Christ, écrit aussi le commentateur de Pirot-Clamer (Tome XII, p. 325)

« possède un sacerdoce aparabaton (hapax biblique), immuable, inaliénable, infini en durée, comme en puissance: de là vient qu'il peut sauver les siens eis to panteles, d'un salut parfait sous tous les rapports, ce qui inclut aussi tous les temps. Le Christ continue d'exercer personnellement son sacerdoce, car il vit toujours pour intercéder en notre faveur ».

Mais s'il n'y a pas de sacerdoce, comment est alors organisée l'Eglise de la Nouvelle Alliance?

Pour édifier le corps du Christ, Dieu a doté les chrétiens de dons divers, utilisant

« les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs. (Eph. 4.11) ou encore comme diacres » (Phil. 1.1 ; 1 Tim. 3.8),

sans qu'il y ait d'hiérarchie. Tel est d'ailleurs l'enseignement de Jésus:

« Mais vous, ne vous faites pas appeler Rabbi; car un seul est votre Maître, et vous êtes tous frères. Et n'appelez personne sur la terre votre Père, car un seul est votre Père, celui qui est dans les cieux. Ne vous faites pas appeler conducteurs, car un seul est votre conducteur, le Christ. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur » (Matth. 23.8 à 11, Segond Rev.).

L'autorité est détenue par le Christ – chef suprême de son Eglise (Eph. 1.22) – et sa Parole.

« Vous avez », écrit encore Paul aux Colossiens (2.10), « tout pleinement en lui, qui est le chef de toute principauté et de tout pouvoir. »

LE MINISTÈRE DES PRESBYTRES-EPISCOPES

Quelle est alors la fonction des presbytres épiscopes?

C'est celle de surveiller l'assemblée locale et d'en être les pasteurs. Lisons ce que leur écrit Pierre (1 Pi. 5.1 à 3) :

« Voici les exhortations que j'adresse aux anciens qui sont parmi vous, moi ancien comme eux, témoin des souffrances de Christ, et participant de la gloire qui doit être manifestée: Paissez le troupeau de Dieu qui est sous votre garde, non par contrainte, mais volontairement, selon Dieu; non pour un gain sordide mais avec dévouement; non comme dominant sur ceux qui vous sont échus en partage, mais en étant les modèles du troupeau. »

En Actes 20. 28, on trouve les mêmes recommandations dans la bouche de Paul:

« Prenez donc garde à vous-mêmes et à tout le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous a établis évêques, pour paître l'Eglise du Seigneur, qu'il s'est acquise par son propre sang. »

Les diacres, mentionnés en deux ou trois endroits seulement du Nouveau Testament (1 Tim. 3.8 et Phil. 1.1) sont les collaborateurs des Anciens. Etienne, Philippe, Proêchore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas devaient être des diacres (service = « diakonia ») et c'est par suffrage de l'Assemblée qu'ils furent choisis, puis présentés aux apôtres pour l'imposition des mains (Actes 6.5 à 6).

LA DÉSIGNATION DES ANCIENS

Les apôtres avaient-ils autorité sur les anciens ou les diacres?

Osty-Trinquet (en note à Actes 11.30) affirment que les anciens étaient « sous l'autorité supérieure des apôtres ». Or, les exhortations de Pierre ne sont pas des consignes autoritaires qui trahiraient une relation de subordination. Bien plus, Pierre se dit « ancien comme eux » (1 Pi. 5.1).

Si les anciens avaient été sous l'autorité des apôtres, Jean aurait-il eu à se plaindre de Diotrèphe ? (3 Jean 9). Les anciens n'étaient pas sous l'autorité des apôtres et ne furent pas non plus nommés par eux. En ce qui concerne leur mode de désignation, les traductions catholiques ne concordent pas avec les traductions protestantes. Le choix des anciens est décrit en Actes 14.23.

Actes 14.23

Voici d'abord les traductions protestantes.

SEGOND

Ils (Paul et Barnabas) firent nommer des anciens dans chaque Eglise. et, après avoir prié et jeûné, ils les recommandèrent au Seigneur en qui ils avaient cru.

DARBY

Et leur ayant choisi des Anciens.

GOGUEL-MONNIER

Ils leur choisirent des Anciens.

SEGOND REV.

Ils firent nommer pour eux des anciens.

Note: on peut aussi comprendre: ils nommèrent pour eux.

STAPFER

Ils nommèrent des anciens.

SYNODALE

Ils nommèrent des Anciens.

PV

... ils firent élire à mains levées

PLE

on leur désignait

GEN

... firent nommer des anciens

Note: Ils choisirent par lever de mains; Election.

COL

.Ils firent nommer pour eux des anciens.

Note: on peut aussi comprendre: ils nommèrent pour eux.

LIV

Ils désignèrent aussi des anciens.

BAN

Ils choisirent des anciens.

Note:
Le verbe que nous traduisons par choisir signifie d'après l'étymologie : Élire en levant la main.
Ces auteurs pensent néanmoins que ce sont les apôtres qui ont choisit les anciens.

Voici maintenant les traductions catholiques avec leurs commentaires.

BUZY

Ils imposèrent les mains à des presbytres.

CRAMPON 1939

Après leur avoir établi des anciens dans chaque église par imposition des mains.

Note:
Le verbe grec kheirotonein, qui signifie proprement élire, désigner par vote à mains levées marque chez les anciens Pères le rite de l'ordination sacramentelle. 

CRAMPON 1960

Ils leur désignèrent des anciens.

JÉRUSALEM

Ils leur désignèrent des anciens.

N. T. LETOUZEY

Ils imposèrent les mains à des presbytres.

Note:
La traduction courante: « Ils instituèrent des presbytres » paraît affaiblir le sens du texte. Le verbe grec employé par saint Luc devint plus tard le terme technique pour ordonner . Cette imposition des mains, accompagnée de prières et de jeûnes a pour but de conférer aux presbytres une aptitude surnaturelle.
Qu'est-elle, sinon une ordination? 

MAREDSOUS

Ils instituèrent des anciens

PIROT -CLAMER

Ayant imposé les mains à des presbytres

Note:
Le verbe kheirotonein – le cum constituissent de la Vulgate n'en est qu'une traduction fort lâche – est devenu chez les Pères grecs le terme technique pour ordonner, Il pourrait cependant signifier: élire (à mains levées), comme dans le grec classique, mais la construction de la phrase kheirotonèsantes autois ne laisse aucune place à l'élection populaire. Le choix appartient aux seuls apôtres, on pourrait peut-être, à l'extrême rigueur, traduire kheirotoênein – choisir, mais il s'agit ici plutôt d'un rite conférant une aptitude surnaturelle, s'accompagnant de la prière et du jeûne (le participe proseuxamenoi est, en effet, coordonné à kheirotonèsantes ): ce rite est par conséquent l'imposition des mains. C'est à tort que les exégètes protestants, depuis Calvin ( Operaomnia, XLVIII, Brunswick, 1882, p. 333), s'autorisaient autrefois de notre texte pour prétendre que les fonctions pastorales étaient électives dans la primitive Eglise.

OSTY-TRINQUET

Ils leur désignèrent des anciens

Note:
Le terme employé par Luc semble indiquer que les anciens ont été désignés par l'imposition des mains. 

TRI

Ils leur désignèrent des anciens

PDB

ils choisirent

Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

ils leurs désignèrent

BFC

ils leur désignèrent

Note: Certains traduisent. Ils firent nommer pour eux

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

ils désignent

On constate que les traductions divergent et l'on va de l'expression « faire nommer » à celle d'« imposer les mains ». Le mot mal traduit, le verbe « kheirotoneô », signifie d'abord: voter à mains levées. Il se rencontre à nouveau en 2 Cor. 8.19.

 

2 Cor. 8.19

Voici comment il a été traduit par les traducteurs protestants

SEGOND

(Nous envoyons avec lui (Tite) le frère (peut-être Luc) dont la louange en ce qui concerne l'Evangile est répandue dans toutes les Eglises), et qui, de plus, a été choisi par les Eglises pour être notre compagnon de voyage.

DARBY

a été choisi par les assemblées.

GOGUEL-MONNIER

a été désigné par les Eglises.

SEGOND REV.

a été désigné par les Eglises.

STAPFER

a été délégué par elles (les Eglises).

SYNODALE

a été choisi par les suffrages des Eglises.

PV

choisi par le vote unanime des Eglises

Note:
L'apôtre emploie ici le terme technique utilisé lors des élections dans la démocratie athénienne (comme dans Actes 14.23)

PLE

a été désigné par les Eglises.

COL

a été désigné par les Eglises.

LIV

a été choisi par les Eglises.

BAN

a été choisi par les suffrages des Eglises.

Voici maintenant les traductions catholiques du même verbe « kheirotoneô » qu'en Actes 14.23.

BUZY

a été désigné par elles.

CRAMPON 1939

a été désigné par le suffrage des Eglises.

CRAMPON 1960

a été désigné par les Eglises.

JÉRUSALEM

a encore été désigné par le suffrage des Eglises.

N. T. LETOUZEY

a été choisi par leur suffrage.

MAREDSOUS

a été délégué par les suffrages des Eglises.

PIROT-CLAMER

a été choisi par le suffrage des Eglises.

OSTY-TRINQUET

a encore été désigné par le suffrage des Eglises.

TRI

a été désigné par les Eglises.

PDB

a été désigné officiellement par les communautés.

OSTR

désigné par les Eglises.
(ancienne édition : désigné par le suffrage des Eglises.)

Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

désigné par les Eglises.

BFC

désigné par les Eglises.

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

choisi par les communautés

Ici la notion de « vote à mains levées » que comporte le verbe (kheiro = main, toneô = lever) a été rendu par le mot « suffrage ». On ne comprend pas pourquoi en Actes 14.23, le même mot a été traduit autrement par les mêmes traducteurs...

Pirot-Clamer a donné ici (Tome XI, 1ère partie, p. 362) le commentaire suivant:

« II a été 'élu à mains levées' (acception classique de 'kheirotoneô', qui manque dans les LXX, et dont le premier sens est: étendre les mains, cf. Actes 14.23), pour aider Paul dans la collecte. C'est donc un personnage officiellement mandaté par les Eglises. qui jouissent d'une organisation autonome, dont le choix averti est un gage de probité et d'indépendance par rapport à Paul lui-même. »

Ajoutons toutefois, que le substantif grec kheirotonia, dérivé du verbe kheirotoneô se trouve, mais une seule fois, dans la version grecque des Septante, en Esaïe (ou Isaïe) 58.9. Le mot y signifie indubitablement levée de la main ou geste malveillant, nullement « imposition des mains ».

Les traductions d'Actes 14.23 qui portent imposer les mains sont à rejeter.

Dans son « Lexicon Graecum Novi Testamenti » , le Père jésuite F. Zorell le reconnaît:

« hoc verbo manuum impositio, quae in ordinationes fit, non formaliter indicatur, sed dumtaxat hominis in sacro munere constitutio », c'est-à-dire: « L'imposition des mains, qui est pratiquée en vue des ordinations, n'est pas indiquée par ce mot, dans sa forme, mais seulement l'institution d'un homme dans une fonction sacrée. »

En effet, l'expression « imposer les mains »que l'on trouve 19 fois dans le Nouveau Testament et 10 fois sous la plume de Luc (Luc 4.40; 13.13; Actes 6.6; 8.17; 8.19; 9.12 ; 9.17 ; 13.3 ; 19.6; 28.8) n'est jamais rendue par le verbe « kheirotoneô », mais généralement par « èpithesis kheiras » ou « epitithèmi kheiras ».

L'expression « désignèrent des anciens » utilisée en Actes 14.23 par quelques traducteurs est également inexacte.

Faut-il rappeler ici comment fut nommé Matthias, le successeur de Judas le traître? Il fut choisi entre deux candidats présentés par les 120 frères par tirage au sort (Actes 1.26). Il n'a donc pas été désigné, ni par Pierre, ni même par le collège apostolique.

Et les premiers diacres, les coadjuteurs des apôtres, n'ont pas non plus été désignés par eux; ils furent élus par l'assemblée et les apôtres ratifièrent ce choix par l'imposition des mains (Actes 6.5 et 6).

Le "Theologisches Wörterbuch zum Neuen Testament" (herausgeben von Gerhard Friedrich, Neunter Band Alpha-Omega, W. Kohlhammer verlag, Stuttgart, 1973) précise la signification de kheirotoneô : Lever des mains pour exprimer une approbation lors d'un vote. Les auteurs de cet ouvrage ajoutent que ce mot peut aussi avoir le sens de : nommer.

Le substantif "kheirotonia", précisent-ils, a, dans les Septante, le sens d'étendre la main, de montrer (désigner) du doigt.

Pourtant, en 2Co 8.19 le sens qu'adopte cet ouvrage est « choisir », et les auteurs pensent qu'en Actes 14.23, il ne s'agissait pas d'un vote de l'assemblée, mais d'une désignation par Paul et Barnabas.

Le débat concernant la meilleure traduction du verbe kheirotoneô demeure ouvert.

L'Histoire de l'Eglise nous apprend cependant que fort longtemps le choix des conducteurs d'Eglises se faisait par suffrage de l'assemblée et non par une désignation par une autorité hiérarchique (voir ci-après).

Tite 1.5

Dans son épître à Tite (1.5), Paul écrit:

« Je t'ai laissé en Crête, afin que tu mettes en ordre ce qui reste à régler et que, selon mes instructions, tu établisses des anciens dans chaque ville ».

Tous les traducteurs ont traduit katastèsès (verbe kathistèmi ) par établir. Or établir signifie: rendre stable, asseoir, installer (c'est le mot utilisé par Stapfer dans ce passage), mais non « désigner ». On retrouve ce terme encore 16 fois dans le Nouveau Testament, avec cette signification, et en particulier à propos des diacres que les apôtres « établiront » dans le diaconat (Actes 6. 3) après leur élection.

Si l'on rencontre encore le verbe « établir » dans le Nouveau Testament, mais avec un sens plus fort que celui d'installer, avec l'acception de « désigner », le verbe utilisé n'est jamais kathistèmi. Ce verbe n'a d'ailleurs jamais Dieu pour sujet.

Si c'est Dieu qui établit, le Nouveau Testament utilise les verbes poïô, prokheirizomai, orizô, tithèmi.

Marc 3.14

Héb 3. 2

Il (Jésus) en établit douze pour les avoir avec lui.

Considérez Jésus qui a été fidèle à Celui qui l'a établi.

poiô

Actes 22.14

Actes 26.16

 Le Dieu de nos pères t'a destiné à connaître sa volonté. Car je te suis apparu pour t'établir ministre.

prokheirizomai

Actes 10.42

Actes 17.31

Rom. 1. 4

C'est lui (Jésus) qui a été établi Juge.

Il jugera le monde par l'homme qu'il a désigné.

et déclaré (désigné) Fils de Dieu.

 orizô

Jean 15.16

Actes 13.47

Actes 20.28

1 Cor. 12.28

1 Tim. 1.12

1 Tim. 2. 7

Héb. 1. 2

 et je (Jésus) vous ai établis pour porter du fruit.

Je (le Seigneur) t'ai établi pour être la lumière.

le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous a établis évêques.

Dieu a établi dans l'Eglise premièrement des apôtres.

(Jésus-Christ) m'a jugé fidèle, en m'établissant dans le ministère.

et pour lequel (Jésus-Christ) j'ai été établi prédicateur et apôtre.

Le Fils qu'il (Dieu) a établi héritier de toutes choses.

tithèmi

 

C'est donc Dieu qui « désigne, appelle »les apôtres, les évêques, les prédicateurs; l'Eglise ne peut que reconnaître cette vocation et « établir, installer » l'appelé dans ses fonctions.

Le seul type de nomination dans l'Eglise primitive est la désigation par l'assemblée des frères ou l'assemblée des anciens. C'est le cas pour Tite (Gal. 2.1 et Actes 15.2), pour Timothée (1 Tim. 4.14) et pour Jude et Silas (Actes 15.22, 27).

Le témoignage de l'Histoire vient confirmer ces faits.

« Nos documents », reconnaît G. Bardy (Théologie de l'Eglise de saint CIément de Rome à saint Irénée, p. 49) « ne nous apprennent rien sur le choix des évêques et de leurs subordonnés, sinon que Dieu est à l'origine de ce choix, opéré sans doute avec l'assentiment du peuple, par un collège restreint : 'L'évéque, les presbytres et les diacres de Philadelphie' sont élus avec l'assentiment de Jésus-Christ, qui de sa propre volonté les a établis et confirmés par son Saint-Esprit.' (Ignace, Philadel. Inscript.) ; ».

Palanque-Chelini (. Pet. Hist. des Grds Conciles », p. 12) décrivent l'Eglise primitive comme composée « d'une foule de communautés autonomes, chacune formant une Eglise qui avait à sa tête un pasteur – l'évêque – élu par le clergé et le peuple des fidèles ».

Dom Charles Poulet (Hist. de l'Egl., tome l, p. 120) nous apprend qu'aux IVe et Ve siècles encore, l'évêque était élu:

« L'élection épiscopale se faisait de la manière suivante: proposition du candidat par le clergé et le peuple, puis ratification par les évêques de la province et le métropolitain ».

Sous les Carolingiens, encore (ibid. p. 192), le choix des évêques se faisait par élection:

« L'Eglise en deuil adresse une supplique au roi et au métropolitain pour obtenir de procéder à une élection qu'opèrent le clergé et les laïques de marque, la foule étant admise comme jadis à témoigner son consentement par acclamation »

C'est Adrien IV (1154-1159) qui commence à recommander ses candidats. Ses successeurs, dont Innocent III (1198-1216), vont jusqu'à annuler les élections et substituer leur propre candidat. Et finalement, l'évêque ne sera plus élu, mais désigné par le pape (ibid. p. 273). Mais, dans l'Eglise primitive, l'évêque de Rome ne possédait pas cette prérogative.

LA PAPAUTÉ

La Tradition catholique – mais non la tradition orthodoxe8 – voit cependant en Matth. 16.18, le fondement de la papauté.

« Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise. »

Or, il n'est pas permis d'isoler un verset de son contexte. Voyez le sens du verset Matth. 16.23, s'il demeure isolé !

Les apôtres n'ont jamais vu dans les paroles de Jésus une déclaration de primauté. Au chapitre 18 de Matth. verset 1, donc après la déclaration de Jésus, les apôtres sont encore à se demander lequel d'eux était le plus grand dans le royaume des cieux, ou, comme écrit Luc (9.46) le plus grand d'entre eux.

Le texte grec distingue d'ailleurs nettement entre Pierre (Petros, nom masculin) et pierre ( petra, nom féminin), petros signifiant pierre et petra signifiant rocher, le premier ayant une valeur partitive par rapport au second.

Le Père jésuite F. Zorell le reconnait dans son « Lexicon Graecum Novi Testamenti », quand il écrit:

Petra : rupes, petra, saxum et quidem (ln opposltione ad 'petros' quod significat 'saxum a monte vel solo solutum, lapidem magnum, sed tantum ut adhuc levari manuque projici possit) »,

c'est-à-dire: Petra: rocher, roc, roche et ceci en opposition à 'petros' qui signifie rocher arraché à une montagne ou au sol, grosse pierre mais qui peut être néanmoins soulevée et lancée à la main.

Le mot petra revient d'ailleurs encore 11 fois dans le Nouveau Testament et 4 fois dans l'Evangile de Matthieu: 7.24 et 25; 27.51 et 60, où tous les traducteurs le traduisent par roc – ou rocher. On le trouve 89 fois dans les Septante où il a indubitablement la même signification.

Le mot petros -, qu'on ne rencontre jamais dans le Nouveau Testament sans être appliqué à Pierre, ne se trouve que deux fois dans la version des Septante, et ceci dans le deuxième livre des Maccabées9. Voici ces passages, selon la traduction de Jérusalem.

2 Macc. 1.16:
(Dès qu'Antiochus y fut entré, ils fermèrent le sanctuaire et,) ayant ouvert la porte secrète du plafond, ils foudroyèrent le chef avec les siens en lançant des pierres.

2 Macc. 4.41 :
Prenant conscience de l'attaque de Lysimaque, les uns s'armaient de pierres, les autres de gourdins, certains prenaient à pleines mains la cendre qui se trouvait là, et tous assaillaient pêle-mêle les gens de Lysimaque.

Ces versets permettent de reconnaître le sens réel de « petros ».

Il faut cependant reconnaître que le mot hébreu kêph;– d'où est venu le mot araméen Kêpha – et que l'on rencontre au pluriel en Jér. 4.29 et Job 30.6 et au singulier dans l'Ecclésiastique 40.15 10, a la signification de roc ou de rocher et les traducteurs des Septante ont traduit par petra , et non par petros11« . »

Comme l'Evangile de Matthieu aurait été rédigé primitivement en araméen, le commentaire de Pirot-Clamer (tome IX, p. 217) se croit autorisé d'affirmer:

« Ce qu'il (Jésus) a dit est certainement: Tu es Kêpha et sur ce kêpha , ».

Mais « le traducteur grec de l'ouvrage, tenu pour inspiré » (Chaîne-Grousset, « Littér. relig.", p. 349) n'aurait-il pas dû traduire alors: tu es petros et sur ce petros ? ...

Et n'est-ce pas le texte grec de l'Evangile de Matthieu qui a été reçu par l'Eglise comme texte canonique, et ceci en raison de son inspiration?

Au reste, le mot « petra », lorsqu'il est utilisé au sens figuré dans le Nouveau Testament, s'applique toujours à Jésus-Christ, et souvent aussi le mot « lithos ».

Rom. 9.33:
Voici, je mets en Sion une pierre (lithos) d'achoppement, et un rocher (petra) de scandale, et celui qui croit en lui ne sera point confus.

1 Cor. 10.4:
(Nos pères) ont tous bu le même breuvage spirituel, car ils buvaient à un rocher (petra) spirituel qui les suivait, et ce rocher (petra) était Christ.

1 Pi. 2.7, 8:
La pierre (lithos) qu'ont rejetée ceux qui bâtissaient est devenue la principale de l'angle, et une pierre (lithos) d'achoppement, et un rocher (petra) de scandale.

Jésus-Christ est donc le roc sur lequel il fondera l'Eglise, son Eglise. « Personne, écrit l'apôtre Paul (1 Cor. 3.11) ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ... Aux Ephésiens, il écrit (Eph. 2. 20) :

« Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes (donc pas sur Pierre) ; JésusChrist lui-même étant la pierre de l'angle ».

C'est par sa confession de foi (Matth. 16.16) que Pierre constitue le premier fragment de l'Eglise constituée par tous les fidèles rachetés qui reconnaissent en Jésus le Christ, le Fils du Dieu vivant. L'apôtre Pierre lui-même l'atteste (1 Pi. 2.4 et 5) :

« Approchez-vous de lui, pierre (lithos) vivante, rejetée par les hommes, mais précieuse devant Dieu, et vous-mêmes, comme des pierres (lithos) vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle, un saint sacerdoce, afin d'offrir des victimes spirituelles, agréables à Dieu par Jésus-Christ ».

Un deuxième texte invoqué par la tradition catholique pour étayer la primauté de Pierre, se trouve en Jean 21.15 à 17.

« Pais mes agneaux !
Paix mes brebis ! »

Voici quelques interprétations catholiques de ces versets. Tout d'abord, le passage en question tel que le donne Alberti dans « Le Message des Evangiles », avec son commentaire intertextuaire:

« Jésus lui dit: « Pais (le troupeau de) mes (fidèles, en guidant ces) agneaux, (en tant que Maitre suprême et infaillible, vers les pâturages de ma vérité) », Jésus lui demanda encore pour la seconde fois: « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu (plus que tous les autres) ? « Pierre lui répondit: « Oui Seigneur tu sais que je t'aime » Jésus lui dit: « Pais (les âmes qui me sont fidèles, en ordonnant à) mes brebis, (en tant que Chef suprême et universel, tout ce qui te semble bon pour leur bien spirituel) ». Jésus lui demanda pour la troisième fois: Simon, fils de Jean, m'aimes-tu (plus que tous les hommes)? « Pierre fut rempli de tristesse parce que Jésus lui avait demandé pour la troisième fois: « M'aimes-tu? » (car il craignait que Jésus ne vit dans son cœur un amour moins grand que celui qu'il pensait avoir; et c'est pourquoi) il lui répondit (très humblement) : « Seigneur, tu connais tout, tu sais que je t'aime. » Jésus lui dit: « Pais (les âmes qui sont sous ma domination, en poursuivant) mes brebis (comme le suprême juge quand elles sortent des pâturages salutaires de la foi). En vérité, en vérité, je te le dis, (c'est à toi qu'est réservée la plus grande autorité mais aussi le plus grand martyre) : quand tu étais jeune, tu te ceignais toi-même... »

Le chanoine Texier, professeur de philosophie et d'apologétique, écrit à propos de ce passage (Précis d'Apologétique, p. 386) :

« Il (Pierre) doit paître et gouverner tout le bercail: les agneaux, c'est-à-dire les fidèles; les brebis, c'est-à-dire les évêques »

C'est aussi l'interprétation qu'a donné de ces termes le grand Bossuet (Sermon sur l'Unité de l'Eglise) 12.

A cela, on peut objecter que le terme brebis – en grec probaton – que l'on rencontre encore 32 fois dans le Nouveau Testament, ne signifie nulle part évèque -, mais dans 27 passages, et en particulier dans ceux de Jean, il désigne incontestablement tous les fidèles ou tous les appelés.

Cette interprétation ne peut donc pas s'appuyer sur une sérieuse étude des textes.

Les commentateurs de Pirot-Clamer (tome X, p. 482) aussi ne reconnaissent plus cette interprétation:

« On n'a aucune raison, écrivent-ils, de penser que les agneaux représentent les simples fidèles et que les brebis signifient les autres apôtres, »

Mais ils ajoutent aussitôt:

« Mais le changement des mots montre bien que le troupeau du bon Pasteur, dans son universalité, est remis entre les mains de Pierre. »

Commentant le « Pais mes agneaux », le chanoine A. Boulenger écrit (Manuel d' Apologétique, p. 337):

« Or d'après l'usage des langues orientales, le mot 'paître' veut dire 'gouverner', Paître les agneaux et les brebis, c'est donc gouverner avec une autorité souveraine l'Eglise du Christ; c'est en être le chef suprême; c'est avoir la primauté. »

Le verbe grec poimaino dit vraiment plus que le verbe français paître. Il dérive de poimèn qui signifie berger. Or le berger ne conduit pas seulement son troupeau au pâturage, mais il l'entretient et en prend soin. C'est dans ce sens que l'entend le Nouveau Testament.

Mais il ne signifie pas gouverner avec autorité souveraine , puisque la même mission échoit aux Presbytres-Episcopes (Actes 20.28; 1Pi. 5.2).

Pour gouverner ou régner, le grec utilise hêgemoneuô (Luc 2.2 ; 3.1), hègeomai (Luc 22.26 ; Héb. 13. 7, 17, 24) ou basileuô (que l'on trouve en 18 endroits du Nouveau Testament, dont 7 fois sous la plume de Jean: Apoc. 5.10; 11.15; 11.17; 19.6; 20.4; 20.6; 22.5).

Quant à l'autorité dans l'Eglise, nous connaissons les recommandations de Jésus à ses apôtres, au moment où s'éleva parmi eux une discussion pour savoir lequel serait le plus grand.

« Les rois des nations leur commandent, et ceux qui exercent l'autorité sur eux se font appeler Bienfaiteurs. Pour vous, il n'en est pas ainsi; au contraire, que le plus grand parmi vous se comporte comme le plus jeune, et celui qui gouverne comme celui qui sert »
(Luc 22.25 et 26, traduction Jérusalem; voir aussi Matth. 20. 25 et Marc 10.42).

Commentant ce verset, Pirot-Clamer écrit (Tome X, p. 259) :

« La conduite des apôtres ne doit pas être celle des princes païens. Dans le royaume de Jésus, celui qui exerce l'autorité devra être comme le plus jeune: Il ne cherchera donc pas les marques extérieures d'honneur et de respect; il fera comme le plus jeune qui, dans les assemblées se garde bien de prendre la première place. Celui qui sera le chef devra ressembler à un serviteur: ne pas chercher à dominer, mais employer son autorité au service des autres: ce n'est pas la négation de l'autorité et de la hiérarchie dans le royaume de Dieu, mais une leçon sur la façon dont devront se comporter ceux qui sont revêtus de l'autorité. »

L'apôtre Pierre enfin, fidèle à l'enseignement de son Maître, va nous donner lui-même le sens du mot « poimainô » en 1 Pi. 5.2 et 3 :

« Paissez le troupeau de Dieu qui vous est confié, le surveillant, non par contrainte, mais de bon gré, selon Dieu; non pour un gain sordide, mais avec l'élan du cœur: non pas en faisant les seigneurs à l'égard de ceux qui vous sont échus en partage. mais en devenant les modèles du troupeau » (traduction Jérusalem).

Le souverain pasteur, en fait, c'est Jésus-Christ, selon l'affirmation même de Pierre:

« Et lorsque le souverain pasteur paraîtra, vous obtiendrez la couronne incorruptible de la gloire« (1 Pi. 5.4). »

En Hébreux 13.20, Jésus est qualifié de grand pasteur:

« Que le Dieu de la paix, qui a ramené d'entre les morts le grand pasteur des brebis, par le sang d'une alliance éternelle... »

Et Jésus, ne proclamait-il pas qu'il était le bon Pasteur (Jean 10.11) et le seul Conducteur?

« ... Car un seul est votre conducteur, le Christ » (Matth. 23.10, Segond Rev.).

Il est incontestable que Pierre a joué, dans les Evangiles, un rôle capital. Il y est toujours cité le premier. Mais cette priorité n'implique aucune primauté. Jacques aussi précède toujours le nom de Jean, qui cependant est l'apôtre préféré de Jésus (Jean 13.23 ; 19.26, etc.).

De plus, dans les épîtres, Pierre n'est plus cité en premier (1 Cor 1.12; 1 Cor. 3.22; 1 Cor. 9.5; Gal. 2.9).

Les textes suivants, ainsi que Matth. 18.1 précédemment indiqué, confirment que les apôtres n'ont jamais reconnu à Pierre aucune primauté.

Si Pierre avait été chef de l'Eglise, peut-on concevoir qu'il aurait eu des successeurs avec les mêmes prérogatives, alors même que d'autres apôtres, dont certainement Jean, étaient encore en vie? Ainsi quatre successeurs auraient régné sur l'Eglise du vivant de l'apôtre Jean comme l'atteste la liste des papes, telle qu'elle se trouve à Rome dans la Basilique de Saint-Paul (R. Morçay, « Nouv. Hist. de l'Egl. », p. 350 ; voir aussi Larousse du XXème siècle).

1° Saint Pierre

33 – 64

2° Saint Lin

64 – 76 (?)

3° Saint Clet

76 – 88 (?)

4° Saint Clément1er

88 – 97 (?)

5° Saint Evariste

97 – 105 (?)

PIERRE A ROME

Une autre question s'impose. Que dit le Nouveau Testament du ministère de Pierre à Rome? Le Nouveau Testament n'en dit rien, absolument rien. Et si Pierre a été à Rome, ce ne pouvait être que pour une très courte durée, et non pas, comme le prétend une vieille tradition, pendant 25 ans. Toutefois, c'est en vertu de cette antique croyance, qu'un prélat doit dire au pape fraîchement élu:

« Tu ne verras pas les années de Pierre » (R. Morçay, Nouv. Hist. de l'Egl., p. 26).

Daniel-Rops, dans « L'Eglise des Apôtres et des Martyrs », p. 109, fidèle à cette antique tradition, écrit:

« Que le Prince des apôtres soit venu à Rome, qu'il y soit arrivé d'assez bonne heure, la chose est certaine; qu'il y ait fait un très long séjour, d'environ 25 ans, coupé par quelques absences, notamment des voyages à Jérusalem, il est certain aussi; et, de même, son martyre dans la ville qu'il consacra par son sang ne fait plus de doute. Mais rien n'est assuré au-delà. »

Toutefois, cette tradition ne reçoit plus l'adhésion unanime de l'Eglise catholique. Dans « Initiation biblique »(Robert-Tricot) p. 619 et 620, on ne parle plus que de deux séjours de Pierre à Rome, le premier entre 43 et 49, le second vers 62-63, après la première captivité de Paul. C'est aussi l'avis du chanoine A. Boulenger (Hist. de l'Egi., p. 40 et 41). Dans l'« Introduction à la Bible » (Robert-Feuillet), tome II, p. 586, on ne parle plus que d'un seul séjour à Rome en 64. Dans « Les premiers jours de l'Eglise », G. Bardy, qui ne croit pas que Pierre ait été le fondateur de la chrétienté romaine (p. 101), écrit (p. 113) :

« Pendant combien de temps saint Pierre demeura-t-il à Rome et y exerça-t-il son ministère? On ne le sait. Ce qu'il y a de sur, c'est qu'il s'y trouvait lorsque, à la suite de l'incendie de Rome, Néron accusa les chrétiens d'être responsables du désastre. »

Pour le chanoine Texier (Précis d'Apologétique, p. 387)

« Il n'était pas nécessaire pour cela que Pierre vînt à Rome. Il suffisait qu'il désignât, comme successeur dans le primat, l'évêque de cette ville. Il a fait au moins cela, comme l'atteste l'acceptation unanime de la primauté romaine par toute l'Eglise, dès l'origine » et l'auteur d'ajouter qu'en fait « on démontre que saint Pierre est venu à Rome pour y gouverner l'Eglise de cette ville et qu'il y mourut ».

Mais le chanoine Texier feint d'ignorer que les dissentiments entre Rome et Byzance remontent au IVème siècle (Dom C. Poulet, Hist. de l'Egl., tome I, p. 119). On ne peut donc pas parler d'« acceptation unanime de la primauté romaine ». Laissons parler saint Grégoire 1er (dit Grégoire le Grand) qui était 'pape' de 590 à 604:

« Je dis sans crainte que quiconque ose s'appeler 'évêque universel' ou désire dans son orgueil que d'autres lui donnent ce titre est le précurseur de l'Antichrist » (Ep. 33 à Maur. Aug.). 13

Est-il donc permis de parler d'« acceptation unanime » de la primauté si les papes eux-mêmes ne la revendiquent pas?

Toujours est-il que la tradition des 25 années de ministère de Pierre à Rome est en train de s'évanouir, prouvant la précaire fragilité des traditions.

En effet, Pierre n'est pas allé à Rome avant le Concile de Jérusalem en 49 (toutes nos chronologies sont empruntées à Jérusalem et à Osty-Trinquet). En effet, dans le livre des Actes, nous le trouvons toujours en Judée, jusqu'au moment du Concile de Jérusalem.

1.15: 

Election de Matthias. 

|

2.5 à 41 : 

Pentecôte.

|

3. 1 :

Guérison du boiteux devant le temple.

|

4. 3 à 22 :

Pierre et Jean devant le sanhédrin. 

|      Jérusalem.

5. 18 :

Nouvel emprisonnement des apôtres.

|

16 2 :

Election des premiers diacres.

|

8. 1 :

Les apôtres restent à Jérusalem malgré les persécutions.

|

 

 

 

8.14:

Pierre et Jean envoyés en Samarie. 

 

8. 25 : 

Retour de Pierre et de Jean à Jérusalem. 

 

9. 32 : ;

Pierre se rend à Lydde. 

 

9:34

Pierre ressuscite Dorcas à Joppé.

 

10.24 :

Pierre se rend chez Corneille à Césarée.

 

11. 2 :

Pierre retourne à Jérusalem.

 

12.3 :

Arrestation de Pierre à Jérusalem.

 

15.2 à 23:

Concile de Jérusalem.

 

 

De plus, au Concile de Jérusalem, Pierre ne dit mot de son ministère à Rome. La lettre rédigée à l'issue de ce Concile était adressée aux frères d'entre les païens, qui sont à Antioche, en Syrie et en Cilicie (Actes 15.23), mais non à ceux de Rome.

A partir de ce moment, le livre des Actes ne parle plus de Pierre.

On constate aussi que ce n'est pas Pierre qui ouvre le Concile et ce n'est pas lui qui le clôt (Actes 15.6, 7 et 15.13).

Pierre ne se trouvait pas à Rome avant la lettre de Paul aux Romains (hiver 57-58), car Paul désire aller à Rome pour y annoncer l'Evangile (Rom. 1. 15) et pour communiquer à cette communauté chrétienne quelque don spirituel (Rom. 1.11). Si Pierre eût été déjà à Rome, Paul n'aurait plus eu ces motifs pour y aller. D'autre part, Paul se glorifie de ne porter l'Evangile que là où aucun autre n'avait posé les fondements (Rom. 15.20). De plus, Pierre ne figure pas sur la liste des 26 personnes que Paul salue en fin de son épître (Rom. 16.3 à 16).

L'origine de la communauté chrétienne de Rome devait remonter à la Pentecôte; à ce moment se trouvaient à Jérusalem des hommes pieux de toutes les nations parmi lesquels « ceux qui sont venus de Rome, Juifs et prosélytes » (Actes 2. 10).

Les Actes nous apprennent (18.2) que Paul rencontra à Corinthe Aquilas et Priscille, sa femme, expulsés de Rome par Claude. Ils l'accompagnèrent en Syrie (Actes 18.18), et sont également avec lui lorsqu'il écrit sa lettre aux Corinthiens (1 Cor. 16.19), en 56, mais ils sont à Rome, au moment où il écrit sa lettre aux Romains (Rom. 16.3). Paul y fait aussi une mention particulière pour Andronicus et Junius, ses parents et compagnons de captivité, qui jouissent d'« une grande considération parmi les apôtres », et qui même ont été en Christ avant lui (Rom. 16. 7). Voilà donc quelques chrétiens de Rome, et qui devaient jouer un rôle primordial dans l'édification de leur Eglise. Pierre n'était pas non plus à Rome à l'arrivée de Paul, ni durant sa première captivité (de 60 à 62 ou 63), car celui-ci n'y rencontra pas Pierre (Actes 28,15).

Dans sa seconde lettre à Timothée, écrite en 66 ou 67, durant sa seconde captivité à Rome, Paul s'y trouve seul avec Luc (2 Tim. 4. 11), sans avoir eu la visite de Pierre, mais il a vu Onésiphore (2 Tlm. 1.16, 17), Eubulus, Pudens, Linus, Claudia (2 Tim. 4.21).

Pierre aurait-il été à Rome entre les deux captivités de Paul? C'est peu probable.

Dans les Actes qu'il a écrits en 67 ou autour de 70 (ou peut-être seulement en 80), Luc a dépeint les pérégrinations des apôtres: voyages missionnaires de Paul, tournée missionnaire de Pierre et Jean en Samarie, voyage de Pierre à Lydde, à Joppé et à Césarée, comment aurait-il pu oublier le grand voyage de Pierre à Rome, surtout si celui-ci avait détenu les prérogatives de la primauté?

De même, il nous a informés du martyre d'Etienne (Actes 6.8 à 16) et de Jacques (Actes 12.2) ; aurait-il pu passer sous silence celui de Pierre? C'est sans doute pour cette dernière raison que Crampon 1960 situe la rédaction des Actes en 62 déjà.

Mais nonobstant le silence complet des Ecritures, les chronologistes catholiques soutiennent que Pierre a subi le martyre à Rome en 64 ou en 67. Ces chronologistes, toutefois, se gardent bien d'indiquer la date de son arrivée à Rome. Leur affirmation est basée sur un simple postulat, absolument hypothétique, à savoir que Babylone est synonyme de Rome. La première épître de Pierre se termine en effet par cette salutation (1 Pi. 5,13) :

« L'Eglise des élus qui est à Babylone vous salue, ainsi que Marc, mon fils »

BABYLONE

Le mot Babylone se trouve neuf fois dans le Nouveau Testament, dont cinq fois dans l'Apocalypse, avec un qualificatif: Babylone la grande (ou la grande ville): Apoc. 14.8; 16.19; 17.5; 18.10; 18.21.

Dans le symbolisme de l'Apocalypse, cette Babylone la grande désignerait Rome (à cause des sept collines d'Apoc. 17.9). Cette interprétation n'a cependant pas reçu l'assentiment de tous les exégètes.

A vouloir soutenir absolument l'identité Rome-Babylone-la-grande, c'est à la capitale de la papauté que s'appliquerait également le verdict:

« Babylone la grande, la mère des impudiques et des abominations de la terre » (Apoc. 17. 5) et celui d'Apoc. 18. 2 : « Elle (Babylone) est devenue une habitation de démons, un repaire de tout esprit impur, un repaire de tout oiseau impur et odieux ». Une voix du ciel invite le peuple de Dieu à la quitter: « Sortez du milieu d'elle, mon peuple, afin que vous ne participiez point à ses péchés » (Apoc. 18.4).

Quatre fois, on trouve le terme de Babylone sans aucun qualificatif, et ceci dans les passages suivants:

Matth. 1.11, 1.17 Actes 7.43, 1 Pi. 5.13

Dans les trois premiers passages, Babylone désigne indubitablement l'ancienne capitale de la Babylonie, située sur l'Euphrate. Du temps des apôtres, cette ville n'était plus capitale; elle faisait partie de l'Empire des Parthes et fut un refuge des Juifs qui y fondèrent des écoles et lui donnèrent une certaine prospérité.

On sait d'autre part que Babylone, dans la géographie ancienne, était aussi une ville d'Egypte, au nord de Memphis. Elle devint, dans les premiers siècles du christianisme, le siège d'un évêché. Une partie des vieux quartiers du Caire occupe son emplacement.

Pierre a utilisé le mot Babylone sans aucun qualificatif; a-t-on le droit de lui attribuer la même signification qu'à l'expression Babylone la grande? L'épître de Pierre relève-t-elle d'un symbolisme analogue à celui de l'Apocalypse?

D'ailleurs, l'épître aux Galates nous donne une indication très précieuse sur l'apostolat de Pierre. Tout comme Paul avait été appelé par Dieu à être l'apôtre des incirconcis, Pierre était appelé à être celui des circoncis (Gal. 2.7 à 9). Ce n'est donc pas à Rome qu'il allait exercer son ministère, à Rome, la capitale du paganisme. Et les Juifs de Rome étaient mal informés sur la »secte« chrétienne à l'arrivée de Paul vers 60 (Actes 28.22).

Ce fait n'empêche pas Daniel-Rops, après avoir affirmé que Pierre a exercé son ministère pendant près de 25 ans à Rome (p. 109), d'écrire (L'Egl. des Apôt. et des Mart. , p. 110) :

« A Rome, sans doute, tandis que Pierre prêchait surtout dans la communauté juive, Paul travailla les milieux païens, soldats, gardiens, courtisans mêmes; leur action dut être parallèle et complémentaire. »

 Or Paul lui-même précise (Col. 4. 10 et 11) qu'Aristarque, Marc et Jésus appelé Justus étaient « du monde des circoncis, et les seuls qui aient travaillé avec moi pour le royaume de Dieu ».

Nous venons de voir plus haut, que Marc était avec Pierre à Babylone (1 Pi. 5.13). Or, dans sa deuxième lettre à Timothée qu'il avait laissé à Ephèse en Asie Mineure (1 Tim. 1.3), Paul lui demande de venir au plus tôt et d'amener avec lui Marc qui lui serait utile pour le ministère (2 Tim. 4.9 à 11). Celui-ci n'était donc pas à Rome au moment de la lettre, sinon Paul lui aurait dépêché Luc: il était en Asie, et sans doute à Babylone.

D'après les renseignements du Nouveau Testament, on connaît les déplacements de Marc.

entre 60 et 63 :

Marc est à Rome (Phm. 24 ; Col. 4.10).
Il doit partir en Asie et passera peut-être à Colosse. 

vers 64 :

Il est avec Pierre à Babylone (1 Pi. 5. 13). C'est en ce moment qu'il aurait rédigé son Evangile.

vers 67 :

Il est en Asie (2 Tim. 4.11).

 

Donc Marc a quitté Rome pour l'Asie, a peut-être passé à Colosse, puis retrouva Pierre à Babylone et demeura en Asie jusqu'en 67.

Si Babylone signifiait Rome, il faudrait admettre que Marc ait fait, dans le même laps de temps, trois fois le trajet de Rome en Asie, puis retour à Rome-Babylone, enfin retour en Asie, ce qui est peu vraisemblable.

En définitive, le Nouveau Testament, inspiré de Dieu, ne contient trace ni d'un sacerdoce hiérarchisé, ni d'une quelconque primauté de Pierre et l'on n'y trouve aucune preuve de son séjour à Rome. Bien plus, l'étude des textes inspirés nous apprend l'impossibilité, pour Pierre d'avoir séjourné pendant 25 ans à Rome, et l'on ne comprend pas – à moins de méconnaître les Ecritures – qu'une telle tradition ait pu survivre jusqu'à nos jours.

 


 

Jésus-Christ et Marie

Mais, lorsque les temps furent accomplis,
Dieu a envoyé son Fils,
né d'une femme,
né sous la loi,
afin de racheter ceux qui étaient sous la loi,
pour que nous recevions l'adoption.
(Gal. 4.4 et 5, Segond Rev.)

  

Matth. 1.25

La première divergence que présentent les diverses traductions apparaît dans le premier chapitre de Matthieu, verset 25. Voici d'abord les traductions protestantes:

SEGOND

Mais il ne la connut point jusqu'à ce qu'elle eût enfanté un fils.

DARBY

Et il ne la connut point jusqu'à...

GOGUEL-MONNIER

Mais il ne la connut pas jusqu'à...

PERNOT

Il ne la connut pas jusqu'à...

STAPFER

Mais il ne la connut pas jusqu'à...

SEGOND REV.

Et il ne la connut point avant qu'elle...

SYNODALE

Mais il ne la connut point, jusqu'à...

PV

...pas de relations avec elle avant qu'elle eût mis au monde un fils.

PLE

... jusqu'à ce que

COL

... jusqu'à ce que

LIV

... elle resta vierge jusqu'à la naissance de son fils

BAN

... jusqu'à ce que

Voici maintenant les traductions catholiques avec leurs commentaires.

BUZY

Et, sans qu'il l'eût connue, elle enfanta...

CRAMPON 1939

Et il ne la connut point jusqu'à...

CRAMPON 1960

Mais il ne la connut pas jusqu'à...

JÉRUSALEM

Et, sans qu'il l'eût connue, elle...

Note:
Le reste de l'Evangile suppose et la tradition ancienne affirme que Marie est plus tard restée vierge.

N. T. LETOUZEY

Et, sans qu'il l'eût connue, elle...

MAREDSOUS

Et, sans qu'il l'eût connue, elle...

Note:
Cette traduction a été choisie de préférence à l'expression habituelle: "Il ne la connut point jusqu'à ce qu'elle eut enfanté son fils", parce que celle-ci est ambiguë et laisserait croire qu'il ait pu en être autrement après la naissance de Jésus. L'évangéliste ne fait aucune allusion à cette période; il se contente de noter catégoriquement que Joseph est complètement étranger à la conception de Jésus. Toute l'ancienne tradition chrétienne est là, d'autre part, pour affirmer la virginité perpétuelle de Marie. Cette question sera reprise à propos de la mention des frères de Jésus.

PIROT-CLAMER

 Et sans qu'il se fût approché d'elle, elle...

Note:
Cette traduction est bien réfléchie; nous la croyons exacte, la seule exacte, mais elle a besoin d'être justifiée. La phrase grecque, rendue matériellement, porte: Et il ne la connaissait pas jusqu'à ce qu'elle eût enfanté un fils... Qu'on le sache donc, disait-il (saint Jérôme), en pareil cas, le latin donec, le grec sôs ou, l'hébreu ad ki nient l'action pour le passé, mais sans l'affirmer nullement pour l'avenir... et le saint docteur cite à l'appui plusieurs exemples devenus classiques. Le corbeau ne retourne pas à l'arche « jusqu'à l'assèchement des eaux », « donec siccarentur aquae »(Gen. 8. 7): est-ce à dire qu'il y revient par la suite, après le déluge ? – Dieu le Père invite le Messie à « s'assoir à sa droite, jusqu'à ce que ses ennemis soient réduits à l'état d'escabeau pour ses pieds », « donec ponam inimicos tuos scabellum pedum tuorum »– : cette humiliation à eux infligée, le Messie quittera-t-il la droite de son Père ?

OSTY-TRINQUET
ALBERTI 

Et, sans qu'il l'eût connue, elle enfanta.,. et sans qu'il se fût approché d'elle, elle...

NOTE: Ce verset traduit littéralement donne ceci: « Et (Joseph) ne la (Marie) connut pas (par l'acte conugal) jusqu'au moment où (elle) engendra un fils. – Or là, les protestants concluent qu'après la naissance de Jésus, Joseph s'approcha de Marie et qu'elle perdit sa virginité. Mais cette opinion se fonde sur une fausse interprétation de la locution « jusqu'au moment où »; comme si celle-ci voulait indiquer que Joseph respecta Marie jusqu'au moment où elle devint mère, mais pas ensuite. Or, dans la Bible, la locution « jusqu'au moment où »fait connaître les faits jusqu'au moment indiqué par elle et point après. Il est dit par exemple: « Mical, fille de Saül n'eut point d'enfants jusqu'au jour de sa mort » (2 Sam. 8. 23). Le Texte sacré ne veut certainement pas dire qu'elle en eut après !... Donc, dans le cas présent, l'évangéliste veut indiquer que Joseph, bien qu'il eut tous les droits sur Marie, la respecta néanmoins, et cette dernière « sans qu'il se fût approché d'elle », engendra son fils Jésus, tout en restant vierge.

LASSERRE

... Et se conformant aux ordres de l'Envoyé du Seigneur, il (Joseph) garde auprès de lui son épouse, respectant sa virginité. Ainsi le temps s'écoula, et le moment vint où elle enfanta son fils premier-né.

SYNOPSE

Et il ne la connaissait pas jusqu'au jour où elle enfanta un fils.

TRI

... jusqu'à ce que ...

PDB

Et sans qu'il ait eu de rapport elle, elle enfanta...

NJER

... jusqu'à ce que ...

Note:
Le texte n'envisage pas la période ultérieure, et de soi, n'affirme pas la virginité perpétuelle.
Ancienne traduction: ... sans qu'il l'eût connue

OSTR

... jusqu'à ce que ...

Note:
Ancienne traduction: ... sans qu'il l'eût connue

BRU

... jusqu'à ce que ...

Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

... jusqu'à ce que ...

BFC

... jusqu'à ce que ...

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

... jusqu'à ce que ...

Pourtant, le texte grec porte bien eôs qui signifie jusque et pendant. En omettant ce mot, la traduction perd son caractère inspiré. En aucun cas, « eôs », ne peut se traduire par sans, mot pour lequel le grec utilise khôris (Matth. 13.34; 14.21 ; 15.38) ou aneu (Matth. 10.29). 14

Une objection bien plus grave encore est la suivante. On retrouve l'expression « eôs ou » devant un verbe (comme dans le passage litigieux), encore dix-neuf fois dans l'Evangile de Matthieu. Trois fois, il signifie pendant :

Matth. 5.25; 14.22; 26.36 (signification impossible en Matth. 1.25). Mais seize fois, il a la signification de « jusqu'à ce que » ou « jusqu'au moment où », impliquant une modification du comportement ou des faits après le moment en question. Ces passages établissent sans doute possible le sens biblique de eôs ou:

Matth. 2.9, 2.13, 5.18, 5.26, 10.11, 10.23, 12.20, 13,33, 16.28, 17.9, 18.30, 18.34, 22.44, 23.39, 24.34, 24.39

Ajoutons à cela, que le mot eôs se trouve en outre encore trente-sept fois devant un verbe, cinquante-six fois devant un substantif et trente fois devant un verbe substantifié, et cela dans le Nouveau Testament 15. Ce n'est pas à des exemples isolés, et encore de l'Ancien Testament qu'il fallait recourir à l'instar de saint Jérôme ou d'Alberti.

Notons également au passage que le mot hébreu 'ad qui a la même signification que « eôs »se rencontre quelque mille fois dans l'Ancien Testament. 16 ; et dans 2 Samuel, cité par Alberti, nous trouvons l'expression 'ad ki ( jusqu'à ce que) huit fois:

10.5, 15.28, 20.3, 22.38, 15.24, 17.13, 21.10, 23.10

Et comme eôs, 'ad ki implique un changement d'attitude après le moment donné.

Quant aux exemples classiques de saint Jérôme et cités par Pirot-Clamer, le premier n'est qu'une simple sophistication. Le texte de Gen. 8. 7 cité à l'appui, est en réalité le suivant:

« et il lâcha le corbeau, qui alla et vint jusqu'à ce que les eaux aient séché sur la terre » (traduction de Jérusalem).

L'expression « jusqu'à ce que » introduit effectivement un changement dans l'attitude du corbeau après l'assèchement des eaux.

Quant à la deuxième citation invoquée:

« jusqu'à ce que ses ennemis soient réduits à l'état d'escabeau pour ses pieds »,

il suffirait de rappeler les termes mêmes du Credo : « ... qui est monté aux cieux, est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant, d'où il viendra juger les vivants et les morts... » (Voir de même Marc 16.19; Actes 1.11 ; 1 Thess. 4. 17).

Luc 1.34

Un souci analogue de sauvegarde du dogme de la Virginité perpétuelle se retrouve dans le commentaire des paroles de Marie lors de l'annonciation:

(Luc 1.34): « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d'homme? »

Ici, les traducteurs sont unanimes, mais les commentaires sont nettement inspirés par le même parti pris.

Buzy note: « Marie comprend que l'ange lui propose de devenir mère du Messie. Elle sait que cette privilégiée doit rester vierge; au surplus, elle a fait vœu de chasteté. Mais elle ignore le mode exceptionnel de cette conception et elle interroge. »

Pour Osty-Trinquet, « Marie est vierge et entend le rester ». La même idée est exprimée par la note de Jérusalem et d'Alberti.

Mareds. Expl. donne le commentaire suivant: « La tradition chrétienne la plus reculée a toujours vu dans cette déclaration une preuve de la virginité perpétuelle de Marie. Bien que la chose ne soit pas dite expressément, cette interprétation est logique. Comment Marie, fiancée, pouvait-elle regarder comme impossible d'avoir un enfant, si elle n'avait pas délibérément décidé – sans doute avec le consentement de Joseph – de rester vierge, même après le mariage? En tous cas, les paroles de Marie n'expriment pas le doute, mais demandent, avec étonnement, une explication. »

Pour le « Vocabulaire de Théologie biblique », il faut déceler dans la déclaration de Marie « le sustrat sémitique 'puisque je ne veux pas connaître d'homme'. »

Les commentateurs de Pirot-Clamer écrivent (Tome X, p. 29) :

« Dans le grec comme dans la Vulgate, le verbe correspond au présent de l'hébreu qui peut se traduire par le présent ou par le futur. »

Plusieurs objections s'imposent. Tout d'abord, il est malaisé de reconnaître dans l'expression de Luc 1. 34 un substrat sémitique, puisque cet évangéliste était « né à Antioche et de culture hellénique » (Osty-Trinquet, Introduction p. 15).

Le chanoine A. Texier, professeur de philosophie et d'apologétique, écrit même, dans son « Précis d'Apologétique », p. 117:

« Le troisième Evangile a pour auteur un Grec d'origine, car sa langue est pure, sans hébraïsme ».

Un auteur catholique est allé plus loin et a proposé de traduire Luc 1.34: « Je garde ma virginité » (Cahier « Evangile », N° 13, p. 24 en note).

En réalité, la stérilité était considérée à cette époque comCertains me une disgrâce. Elisabeth, miraculeusement guérie de sa stérilité disait:

« C'est la grâce que le Seigneur m'a faite, quand il a jeté les yeux sur moi pour ôter mon opprobre parmi les hommes » (Luc 1.25).

Mareds. Expl. ne comprend pas que Marie ait pu formuler sa question si elle n'avait décidé de demeurer vierge. Pourtant, selon la coutume juive « la cérémonie des fiançailles était la signature du contrat; celle du mariage, parfois de longtemps postérieure, était la fête au cours de laquelle l'époux conduisait la mariée dans la chambre nuptiale » (Commentaire de Mareds. Expl. à Matth. 1.19). Si la date prévue pour le mariage de Joseph et de Marie était encore lointaine, sa question est tout à fait légitime. Si Marie avait fait vœu de chasteté, n'aurait-elle pas dit:

« Comment cela se fera-t-il puisque je ne connaîtrai point d'homme » ou « puisque je dois demeurer vierge » ?

Mais son affirmation est au présent:

« Je ne connais point d'homme »

et non au futur: « Je ne connaîtrai point d'homme ».

Si l'on croit à l'inspiration totale des Ecritures, cette objection n'est pas une vaine minutie.

D'ailleurs, les évangélistes ne qualifient Marie de vierge qu'avant la naissance de Jésus: une fois directement en Luc 1.27 et une fois par allusion en Matth. 1.23. Après la naissance, ils ne lui réservent que le nom de « Marie » : Matth. 2. 11 ; 13. 55 ; Marc 6. 3 ; Luc 2. 34 ; Actes 1. 14 ou celui de sa mère : Matth. 2.13; 12.46; Luc 2.51 ; Jean 19.26.

LES FRÈRES DE JÉSUS

Dans les passages que nous venons de passer en revue, on découvre que la virginité perpétuelle de Marie n'est fondée que sur la Tradition 17 et des suppositions hypothétiques, acceptées cependant comme des axiomes sur lesquels on s'appuie pour démentir ensuite ce que la Bible affirme nettement, comme nous allons le voir à propos des frères de Jésus. En effet, tous les commentateurs catholiques affirment que le mot frère en langage biblique, signifie cousin. Et Henri Lasserre, dans « Les saints Evangiles », pour lesquels il avait reçu les éloges du pape Léon XIII, écrit carrément: proches, parents, parenté ou cousins, là où les autres traducteurs mettent frères.

Voici le commentaire que donne sur la question Mareds. Expl. à Matth. 12.46.

« Ses frères » : ce mot est à l'origine de nombreuses controverses, où se trouve en jeu la croyance de l'Eglise catholique en la perpétuelle virginité de Marie, mère de Jésus. L'expression « frères de Jésus » revient en divers endroits des évangiles (on y parle même de ses sœurs). Voir Matth. 13.55 ; Marc 6.3: Jean 2.12; 7.3-5. Certains voient dans ces « frères » de Jésus des enfants de Joseph et de Marie, nés après lui. Cette manière de voir est contraire à la tradition de l'Eglise catholique. D'autres, particulièrement les théologiens des Eglises d'Orient, y voient des enfants de Joseph, qui eût été marié, et, veuf, avant d'épouser Marie. Cette opinion ne se défend guère après une étude sérieuse des textes. La seule explication communément admise dans le catholicisme est fondée sur le fait que ce mot « frère » est couramment utilisé en hébreu pour désigner n'importe quel degré de parenté proche. Plusieurs exemples peuvent être relevés dans l'Ancien Testament: Gen.13.8 et 14.12; 29.15 et 24.29; Lév. 10.4. 1 Chron. 23.22. Il s'agirait donc ici de « cousins » de Jésus. La discussion détaillée de cette épineuse question dépasse les limites de ce commentaire de simple vulgarisation. L'on pourrait toutefois citer ici les deux arguments suivants, qui donneront à réfléchir:

1. Si la Vierge avait eu une famille nombreuse, dont plusieurs enfants – tel Jacques, premier évêque de Jérusalem – ont occupé des fonctions importantes dans l'Eglise primitive. la tradition, pratiquement unanime, de sa perpétuelle virginité, n'aurait jamais pu se développer.

2. Si elle avait eu plusieurs fils en vie, qui eussent pu prendre soin d'elle, le Seigneur, au moment de mourir en croix, ne l'aurait jamais confiée aux soins de Jean l'apôt
re. »

*

Il est vrai qu'une « étude sérieuse » des textes ne permet pas d'appuyer l'opinion des Orthodoxes. Aucun évangéliste ne nous présente Joseph comme veuf, ayant des enfants de son précédent mariage. De plus. pour fuir en Egypte, il ne partit qu'avec l'enfant Jésus et Marie (Matth. 2. 14). Luc précise en 2. 41 que

« les parents de Jésus allaient chaque année à Jérusalem à la fête de Pâques ».

Le mot grec utilisé est goneis qui signifie père et mère; certains manuscrits portent même Joseph et Marie. Ils y allaient donc seuls jusqu'au moment où Jésus avait douze ans (Luc 2.42). Mareds. Expl. note que « c'est au début de leur treizième année que les jeunes Israélites prenaient rang dans la communauté religieuse de leur localité et devenaient assujettis aux obligations de la loi religieuse ». C'est alors que Jésus resta à Jérusalem, à l'insu de Marie et de Joseph qui le cherchèrent « parmi leurs parents et connaissances » et non parmi ses frères. On peut en conclure que Jésus n'avait pas de frères plus âgés que lui, issus d'un premier mariage de Joseph. On ne peut toutefois en déduire, comme le fait Crampon 1960 dans le Dictionnaire du Nouveau Testament qui lui est annexé, que Jésus était le seul enfant; l'obligation légale d'aller à Jérusalem ne commençant qu'à douze ans, Jésus pouvait avoir des frères plus jeunes que lui, restés à Nazareth chez quelque parent, comme Jésus lui-même y était resté jusque-là.

L'étude approfondie des textes permet-elle de soutenir l'opinion catholique traditionnelle qui voit dans le terme « frère » des proches parents ou des cousins?

Et d'abord, quels sont les textes où l'on parle des frères de Jésus? Ils sont au nombre de quinze. Les voici, avec leur référence.

Matth. 12.46:

... sa mère et ses frères, qui étalent dehors, cherchèrent à lui parler.

Matth. 12. 47 :

 Voici, ta mère et tes frères sont dehors, et ils cherchent à te parler.

Matth. 13.55 :

 ... Jacques, Joseph, Simon et Jude, ne sont-ils pas ses frères? Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes parmi nous?

Marc 3.31:

Survinrent sa mère et ses frères...

Marc 3. 32 :

 Voici, ta mère et tes frères sont dehors et te demandent.

Marc 6. 3:

N'est-ce pas le charpentier, le fils de Marie, le frère de Jacques, de Joses, de Jude et de Simon? Et ses sœurs ne sont-elles pas ici parmi nous?

Luc 8.19:

La mère et les frères de Jésus vinrent le trouver.

Luc 8.20 :

Ta mère et tes frères sont dehors, et ils désirent te voir.

Jean 2.12:

Après cela, il descendit à Capernaüm, avec sa mère, ses frères et ses disciples.

Jean 7. 3:

Et ses frères lui dirent: Pars d'ici et va en Judée.

Jean 7. 5:

Car ses frères non plus ne croyaient pas en lui.

Jean 7.10 :

Lorsque ses frères furent montés à la fête.

Actes 1.14:

Tous d'un commun accord persévéraient dans la prière avec les femmes. et Marie, mère de Jésus, et avec les frères de Jésus.

1 Cor. 9. 5

N'avons-nous pas le droit de mener avec nous une sœur qui soit notre femme, comme font les autres apôtres, et les frères du Seigneur, et Céphas ?

Gal. 1. 19

Mais je ne vis aucun autre des apôtres, si ce n'est Jacques, le frère du Seigneur.

 

Le mot grec utilisé dans tous ces passages est « adelphos », ce qui signifie littéralement issu de la même mère delphus signifie matrice). Tous les auteurs sacrés et tous les manuscrits utilisent ce mot; dans aucun des nombreux manuscrits il n'est remplacé par une variante, tel cousin ou proche.

Les mots « parents, parenté, proches », et désignant les proches parents sont connus par les évangélistes et utilisés seize fois dans le Nouveau Testament (sungeneia, sungenes, sungenis, oï par'autou). Il s'agit des passages suivants: Marc 3. 21 ; 6. 4; Luc 1. 36; 1. 58; 1. 61 ; 2. 44 ; 14.12; 21.16; Jean 18.26; Rom. 9.3; 16.7; 16.11 ; 16.21 ; Actes 7.3; 7.14; 10.24.

Or ces termes n'ont nulle part la signification attribuée par l'Eglise catholique au mot frère et on ne les trouve jamais dans un contexte où ils seraient applicables aux frères de Jésus.

Et quel intérêt pouvait offrir la liste nominative des frères de Jésus (Matth. 13.55 et Marc 6.3) après le nom de la mère, si ce n'étaient que des cousins et non des frères réels?

Crampon 1960 (Dictionnaire du Nouveau Testament) note à propos de ces passages, que « c'est par opposition à ceux qui sont appelés « ses frères » que Jésus est désigné comme le fils de Marie (Marc 6.3) ».

Mais les mêmes écrivains sacrés parlent aussi de « Jacques, fils de Zébédée, et Jean, son frère » (Matth. 10.2; Marc 3.17) sans qu'on n'y ait vu une opposition ou une filiation différente.

Ce n'est qu'en hébreu que le mot frère (ah) peut aussi désigner des cousins ou des amis. Toutefois, dans 34 passages de l'Ancien Testament 18, ce mot désigne aussi des frères réels; dans 15 passages, il a la signification de demi-frères 19. Et bien souvent il désigne les frères dans la foi et ce n'est que 5 fois qu'il a, de manière certaine, la signification de proche parent, et une seule fois celle de cousin germain 20.

Même si les passages précédents nous étaient parvenus en hébreu ou en araméen, il ne serait donc pas permis d'affirmer, d'une manière péremptoire, qu'il s'agissait de cousins.

*

Mais il importe de bien se rappeler que le Nouveau Testament nous est parvenu en grec! Et c'était même la langue maternelle de Luc, selon l'unanimité des commentateurs catholiques. Or, ce dernier écrit bien, à propos de l'incident à l'âge de douze ans, que Marie et Joseph le cherchaient « parmi leurs parents (sungeneus) et connaissances » (Luc 2.44). Pourquoi aurait-il utilisé alors en Luc 8.19 et 20 le mot adelphos s'il ne s'était agi que de cousins? En Luc 14.12 et 21.16, il place côte à côte le mot frère ( adelphos), le mot proche (sungenes) et le mot ami (philos) établissant ainsi nettement la différence de sens entre ces termes.

Le mot cousin (anepsios) existe en grec et Paul l'a utilisé (Col. 4. 10) en parlant de Marc, cousin de Barnabas (ou Barnabé). Or ce même Paul désigne Jacques, comme le frère du Seigneur. (Gal. 1.19) et mentionne « les frères du Seigneur » en 1 Cor. 9.5.

Dans les Actes (23.16), Luc nous parle du « fils de la sœur » de Paul. Or les frères de Jésus ne furent jamais désignés comme les fils de la sœur de Marie.

Au demeurant, le mot frère qui revient encore une soixantaine de fois dans le Nouveau Testament y a la signification soit d' amis, de frères dans la foi ou bien de frères réels, ceci dans les 14 passages suivants: Luc 12. 13; 15. 27 et 32; 16. 27 ; 20. 28 et 29; 21. 16; Marc 12.19; 13.12; Matth. 10.21 ; 22.24; Jean 11. 21 et 23 ; 1 Jean 3. 12.

Mais jamais, tout au long du Nouveau Testament, ce mot n'a la signification de « cousin »!

Luc a même précisé que Marie mit au monde son fils premier-né. (Luc 2.7). La Vulgate ajoute aussi le mot premier-né à Matth. 1.25. Les commentateurs catholiques affirment qu'il s'agit là d'une expression hébraïque traditionnelle qui n'implique pas la naissance d'un ou de plusieurs autres enfants. Elle soulignerait simplement la dignité et les droits de l'enfant.

Mais si Marie n'avait pas eu d'autres enfants, n'était-on pas en droit d'attendre de la plume de Luc le qualificatif d' unique que l'on retrouve par trois fois sous sa plume: pour désigner le fils de la veuve de Nain (Luc 7.12), l'enfant démoniaque (Luc 9. 38) et la fille de Jairus (ou Jaire) (Luc 8. 42).

Il est pour le moins surprenant que jamais Jésus n'ait été qualifié de fils unique de Marie et qu'à aucun autre endroit ses frères ne furent appelés cousins ou parents. Bien plus, Marc nous apprend (3. 21) que les « proches » (parenté de Jésus, ou ses amis, ou les deux ensemble selon Mareds. Expl.) vinrent pour se saisir de lui, car ils disaient qu'il avait perdu le sens. Et il précise ensuite (verset 31) que survinrent sa mère et ses frères qui l'envoyèrent appeler. On connaît la réponse de Jésus (verset 35) :

"Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma sœur et ma mère ».

Remplacer le mot frère par cousin, c'est faire perdre tout sens à l'affirmation de Jésus.

D'ailleurs, le mot sœur (en grec adelphè), que l'on rencontre dans les passages suivants: Matth. 13.56 ; Marc 3.32 (dans plusieurs manuscrits, mais non pas dans tous) ; Marc 6. 3, n'a jamais le sens de cousine, ni en hébreu, ni en grec. Dans l'Ancien Testament, ce terme désigne outre les sœurs dans la foi, 13 fois les sœurs réelles 22, 3 fois les demi-sœurs23 et 12 fois, il est pris dans un sens allégorique.24

Dans le Nouveau Testament, il revient encore 13 fois pour désigner soit les sœurs dans la foi, soit les sœurs réelles, mais jamais les cousines. Par sept fois, ce mot y désigne les sœurs réelles: Marc 10.29; Luc 10.39; 10.40; 14.26 ; Jean 19.25 et Actes 23.16.

D'ailleurs aucun commentateur catholique ne prétend, de manière explicite, que le mot sœur (« ahot » en hébreu) puisse aussi signifier cousine: il ne saurait appuyer cette idée sur aucun exemple biblique.

De plus, il faut souligner qu'à partir du ministère public de Jésus, Marie n'est mentionnée qu'à cinq reprises dans le Nouveau Testament.

Elle est accompagnée des frères de Jésus au retour des noces de Cana (Jean 2.12) ; elle est encore accompagnée d'eux lorsqu'ils veulent lui parler (Matth. 12.46 et 47; Marc 3.31 et 32 ; Luc 8.19 et 20). Et les évangélistes Matthieu (13.55) et Marc (6.3) annexent au nom de Marie celui des frères de Jésus.

On la rencontre, et pour la dernière fois, après la résurrection dans la chambre haute, et de nouveau avec les frères de Jésus (Actes 1.14).

Même s'ils ne sont jamais qualifiés de « fils » de Marie, leur quasi continuelle présence avec Marie ne permet pas de n'y reconnaître que des cousins.

LES COUSINS DE JÉSUS

Toutefois, pour expliquer cette continuelle présence des frères de Jésus auprès de Marie, Crampon 1939 (dans son Dictionnaire du Nouveau Testament) recourt à l'une des suppositions suivantes:

« Après la mort de S. Joseph, arrivée selon toute vraisemblance avant le commencement de la vie publique du Seigneur, Marie se retira, semble-t-il, avec son divin Fils, chez son beau-frère Cléophas (Clopas), de telle sorte que les deux familles furent comme fondues en une seule. Selon d'autres, c'est Cléophas qui serait mort le premier, et S. Joseph qui aurait recueilli chez lui la veuve et les enfants de son frère. »

Mais le même, quelques lignes plus tôt, ainsi que Mareds. Expl. estiment tout à fait inconcevable que Jésus, du haut de sa croix, eût recommandé sa mère à Jean, « si elle avait eu plusieurs fils en vie qui eussent pu prendre soin d'elle » (Mareds. Expl.).

Or, si les deux familles – celle de Marie et celle de Clopas – étaient comme fondues en une seule, on ne comprend plus le besoin de confier Marie à Jean.

Au pied de la croix, en effet, on rencontre Marie, et pour la première fois, seule. Jésus la confia alors à Jean. Pourquoi? Parce qu'elle allait se trouver seule? Ou bien pour la soustraire du milieu de ses frères qui devaient encore le « mépriser » (Matth. 13.57; Marc 6.4) et qui « ne croyaient pas en lui » (Jean 7. 5) ? Ce manque de foi était encore manifeste au moment de la fête du tabernacle de l'an 29, soit six mois avant sa mort !

Si Jésus a précisément choisi Jean pour lui confier Marie, c'est que celui-ci était sans doute son cousin germain, c'est-à-dire le neveu de Marie. On peut le conjecturer par la comparaison des listes des femmes mentionnées au pied de la croix en Matth. 27.56, Marc 15.40 et Jean 19.25.

Jean 19.25

Marc 15.40

Math. 27.56

sa mère

 

 

La sœur de sa mère

« Salomé »

la mère des fils de Zébédée

Marie (femme) de Clopas

Marie, mère de Jacques le mineur et de Joses

Marie, mère de Jacques et de Joseph

Marie de Magdala

Marie de Magdala

Marie de Magdala

Il semble que la mère des fils de Zébédée (Jacques et Jean), identifiable avec Salomé, serait la sœur de Marie. On s'explique ainsi pourquoi, avec Pierre, Jacques et Jean étaient les apôtres les plus proches de Jésus. Et l'on comprend ainsi mieux que leur mère ait osé lui demander les premières places pour ses fils (Matth. 20.20).

Certains cependant – et c'est aussi l'opinion exprimée par Crampon 1939 et 1960 – affirment que « la sœur de sa mère », en Jean 19.25 était Marie, femme de Clopas, mère de Jacques (le mineur) et de Joses (ou Joseph).

Jean 19.25

Marc 15.40

Math. 27.56

sa mère

 

 

 

Salomé

la mère des fils de Zébédée

La sœur de sa mère
Marie (femme) de Clopas

Marie, mère de Jacques le mineur et de Joses

Marie, mère de Jacques et de Joseph

Marie de Magdala

Marie de Magdala

Marie de Magdala

Ainsi, Jacques et Joses seraient d'authentiques cousins germains de Jésus que l'on veut identifier avec les « frères de Jésus« des listes de Matth. 13.55 et de Marc 6.3 qui mentionnent: « Jacques, Joses, Simon et Jude ». De plus, ce Jacques serait l'apôtre, le premier évêque de Jérusalem et que Paul désigne comme le frère du Seigneur.

Il y a cependant de très sérieuses objections à cette hypothèse.

Il faudrait d'abord pouvoir démontrer qu'il n'y avait que trois femmes au pied de la croix et non quatre (Jean 19. 25). En outre, ne serait-il pas étonnant que deux sœurs vivantes aient porté, simultanément, le même prénom? On n'en connaît, du moins, aucun exemple dans toute la Bible. Le seul exemple cité dans le Dictionnaire du Nouveau Testament annexé à la Bible Crampon 1939 est d'origine païenne et non judaïque.

Il faut ensuite démontrer que Marie, femme de Cléophas (Clopas) de Jean 19.25 est bien la même que la Mère de Jacques et de Joses en Matth. 27.56 et Marc 15.40.

Enfin, si ce Jacques est l'apôtre, il reste à démontrer que Cléophas (Clopas) de Jean 19.25 et Alphée de Matth. 10.3 et Marc 3.18 ne sont que des variantes dialectales de prononciation du même nom, comme l'affirme Crampon 1939.

Rien cependant ne permet de le prouver, et la note basale p. 11 et 12 du Cahier « Evangile » N° 43 (sous la direction du Père Dominicain J. G. Gourbillon) se montre plus prudente. Il y est question de Jacques, l'auteur de l'épître. La note précise:

« Il s'agit, sans doute de Jacques, qui présida la communauté de Jérusalem (Actes 12.17: 15. 13: 21.18: 1 Cor. 15.7): d'après Gal. 1.19, il était 'frère du Seigneur' (c'est-à-dire son parent: cf. 1 Cor. 9.5), donc l'un des personnages nommés en Matth. 13.55: Marc 6.3 et Matth. 27.56. Il n'est pas impossible que ce Jacques soit le même personnage que l'apôtre Jacques, fils d'Alphée (Matth. 10.3; Marc 3.18: Luc 6.15; Actes 1.13), appelé aussi 'Jacques le petit' (Jacques le mineur) en Marc 15. 40 ; mais rien ne permet de le prouver de façon certaine. »

L'opinion à laquelle se raille le Révérend Angelo Alberti diffère encore des précédentes, et, dans son « Message des Evangiles », p. 76, il échafaude une hypothèse selon laquelle Joseph avait une sœur appelée Marie et un frère appelé Cléophas (Clopas). La sœur aurait épousé Alphée et son frère une autre Marie. Et cet auteur donne l'arbre généalogique suivant:

                    —————————————————————————————————
                    |                                             |                                                   |
                    |                                             |                                                   |
          Vierge Marie – St Joseph         Marie – Alphée                        Cléophas – Marie
                   |                                              |                                                   |
                   |                                    ————————                             ————————
                   |                                   |                       |                            |                        | 
                Jésus                           Jacques          Joseph                    Judas                 Simon
                                                  le mineur                                         Thaddée            le Zélote
                                                   (apôtre)                                                      (apôtres)
 

Cette hypothèse est encore plus conjecturale que la précédente, car l'Evangile ne parle pas de la filiation de Simon le Zélote (Matth. 10.4 ; Marc 3. 19 ; Luc 6.16) et il qualifie Jude (Thaddée) de fils de Jacques (Luc 6.16, Actes 1. 13) et non de Cléophas. Selon cette hypothèse, trois cousins germains de Jésus étaient apôtres.

Or, quelle que soit l'hypothèse retenue, Jean n'aurait pas pu écrire – si le mot « frère » avait la signification de « cousin » – que « ses frères non plus ne croyaient pas en lui » (Jean 7.5), puisque certains faisaient partie des douze, et ceux-ci avaient « cru » et « reconnu » en Jésus le « Saint de Dieu » (Jean 6.69).

Donc le principe de l'inerrance 25 des Ecritures interdit de considérer Jacques le fils d'Alphée, Jude (Thaddée) et Simon le Zélote comme les « frères » du Seigneur.

Pourtant, le Rév. A. Alberti conclut son étude sur cette question en ces termes: « Et pour peu qu'ils veuillent être logiques, les protestants doivent admettre que Marie, la mère de Jésus, n'eut point d'autres enfants », Mais la dialectique de cet auteur ne pêche-t-elle pas précisément contre la logique?

En ce qui concerne la filiation des« sœurs » du Seigneur, tous les commentateurs catholiques restent muets.

Une dernière hypothèse, enfin, évidemment rejetée par les catholiques, voit en Marie, mère de Jacques et de Joses, également celle de Jésus.

Jean 19.25

Marc 15.40

Math. 27.56

sa mère

 Marie, mère de Jacques le mineur et de Joses

 Marie, mère de Jacques et de Joseph

La sœur de sa mère

Salomé

La mère des fils de Zébédée

Marie (femme) de Clopas

 

 

Marie de Magdala

Marie de Magdala

Marie de Magdala

En conclusion, le terme frère ( adelphos en grec) n'a jamais, dans le Nouveau Testament, la signification de cousins. Les termes cousins, parents, parentés, proches ne sont jamais utilisés pour désigner les enfants qui accompagnent Marie et pour lesquels tous les évangélistes et tous les manuscrits réservent le nom de frères. De plus, Luc qualifie Jésus de premier-né et non de fils unique.

Enfin, le mot sœur n'a jamais, ni en hébreu, ni en grec la signification de cousine.

Il faut en conclure, logiquement, que Jésus avait des frères et des sœurs. Et il ne reste donc que la Tradition pour affirmer la virginité perpétuelle de Marie. Mais même la Tradition n'est pas unanime, puisque les orthodoxes ont une interprétation différente de celle des catholiques, toutes deux en flagrante contradiction avec les Ecritures.

JE VOUS SALUE, MARIE
ou Luc 1.28

Des divergences de traduction apparaissent aussi en Luc 1. 28, dans le but évident de justifier un dogme. Voici d'abord les traductions protestantes.

SEGOND

Je te salue, toi à qui une grâce a été faite.

DARBY

Je te salue, toi que (Dieu) fait jouir de sa faveur.

GOGUEL-MONNIER

Je te salue, toi l'objet de la grâce (divine)

PERNOT

Salut, Ô favorisée.

SEGOND REV.

Je te salue, toi à qui une grâce a été faite.

STAPFER

Salut, une grâce t'a été faite.

SYNODALE

Je te salue, toi qui a été comblée de grâce.

PV

 ... te comble de grâce.

PLE

...réjouis-toi grâcieuse

COL

... toi à qui une grâce a été faite

LIV

... toi à qui Dieu accorde une grâce.

BAN

... toi qui a été reçue en grâce.

 

 Voici maintenant les traductions catholiques avec leurs commentaires.

BUZY

Je vous salue, pleine de grâce.

Note:
L'expression s'accorde parfaitement au dogme de l'Immaculée Conception, si elle ne l'établit pas Salut, pleine de grâce. Salut, pleine de grâce. 

CRAMPON 1939

Salut, pleine de grâce.

CRAMPON 1960

Salut, pleine de grâce.

Note:
Litt, devenue objet de la faveur (divine)

JÉRUSALEM

Salut, comblée de grâce.

Note:
Litt. toi qui as été et demeures remplie de grâce (de faveur divine). 

MAREDSOUS EXPL.

Je vous salue, pleine de grâce.

Note:
Pleine de grâce: autre traduction: comblée des faveurs divines. L'ange reconnaît en Marie une sainteté d'un caractàre tout particulier, privilège que Dieu lui a octroyé en vue de la rendre digne de la maternité divine. La tradition chrétienne la plus ancienne a exprimé ce privilège par la croyance en l'absolue pureté de l'âme de la Vierge Marie, préservée, dès le premier instant de sa conception, de la tache originelle. 

N. T. LETOUZEY

 Salut, pleine de grâce.

PIROT -CLAMER

 Salut, pleine de grâce.

Note:
Le parfait grec kekharitoménè, pleine de grâce, indique la possession non transitoire, mais permanente... C'est parce qu'elle est pleine de perfection morale que le Seigneur est avec elle. 
Cette grâce abondante, elle la possède dès avant la conception de Jésus ; Dieu l'a préparée à sa tâche. Aussi Pie IX, dans la bulle ineffabilis, a-t-il pu tirer de ces paroles de l'ange un argument en faveur de l'Immaculée Conception 

OSTY-TRINQUET

 Salut, remplie de grâce.

Note:
Jésus est « plein de grâce « (Jean 1.14) par droit de filiation divine, Marie en est « remplie » par privilège insigne. 

ALBERTI:

Réjouis-toi, pleine de grâce.

NOTE: « pleine de grâce ». Ces paroles indiquent non seulement que Marie avait été préservée du péché originel « depuis le premier instant de sa conception » dans le sein de sa mère Anne (= plénitude de grâce dans le temps) mais qu'elle avait une extraordinaire profusion de grâces, de dons et de vertu dans son âme (= plénitude de grâce par enrichissement). D'où plénitude magnifique, comme l'indiquent les paroles de l'ange, dans le temps et par enrichissement. Plénitude doit être entendu ici dans le sens de « surabondance », car toutes les vertus des anges, des saints et des hommes, réunies ensemble, ne peuvent être comparées à celles de Marie. Marie a eu cette plénitude de grâce au moment de sa conception, elle se trouvera encore enrichie après l'Annonciation; et cette grâce ne fera qu'augmenter jusqu'au jour de son Couronnement dans le ciel; mais le moment de l'Annonciation est pour elle un point culminant, et l'Ange la salue à juste titre en l'appelant « pleine de grâce ».

 LASSERRE :

Je vous salue, vous qui êtes pleine de grâce.

SYNOPSE :

Salut, pleine de grâce.

TRI

Salut, pleine de grâce.

Note:
Devenue objet de la faveur divine

PDB

Réjouis-toi, Aimée de Dieu

BRU

pleine de grâce

Voici maintenant les traductions interconfessionnelles

TOB

Toi qui a la faveur de Dieu

Note:
litt. favorisée

BFC

Le Seigneur t'a accordé une grâce particulière

  Voici maintenant la traduction Chouraqui

CHO

Dilection, ô toi, pleine de Dilection (éd. 1976)

Toi qui a reçu la paix (éd. 1985)

 

Albin Flury: (Lettres à Christine – Un prêtre répond à une protestante -, p, 69 et 70) donne, à propos de ce passage le commentaire suivant:

« ... L'ange Gabriel a salué la jeune fille de Nazareth comme étant « pleine de grâce ». Cette grâce, c'était l'amitié de Dieu redonnée, mais elle était le fruit de la mort du Rédempteur Jésus-Christ. Il fallait donc que Marie ait déjà reçu d'avance, par faveur spéciale du Père céleste, cette grâce en héritage, à cause de sa dignité de mère de Dieu... En partant de cette réalité, la mère de Dieu est glorifiée dans l'Eglise catholique comme l'Immaculée Conception, comme celle qui seule entre tous les humains fut préservée de la tache du péché originel dès le premier instant de sa conception. A ce privilège s'ajoute un deuxième: l'Assomption corporelle au Ciel... Telle que Marie devait être sur terre – la proche compagne de la vie de Jésus – telle elle doit jouir d'une manière particulière de la présence toute proche et bienheureuse du Fils dans la gloire céleste. Ceci vaut également du pouvoir d'intercession. »

La mésintelligence provient de la traduction du mot grec kekharitoménè qui signifie littéralement: la étant graciée ou la rendue agréable. C'est en effet le participe présent passif du verbe kharitoô que l'on retrouve en Eph. 1.6 et qui signifie: donner, accorder la grâce, rendre agréable. Les traducteurs catholiques ont traduit ce verbe correctement en Eph. 1. 6.

... à la louange de gloire de sa grâce, dont il nous a gratifiés dans le Bien-aimé
(traduction Jérusalem).

... afin de faire resplendir la grâce merveilleuse qui nous a été octroyée par lui dans le Bien-Aimé
(traduction Maredsous).

... pour faire éclater la gloire de la grâce qu'il nous a départie par son (Fils) bien-aimé
(traduction Buzy).

Dans son « Lexicon Graecum Novi Testamenti », le Père jésuite F. Zorell donne de « kekharitoménè » la traduction latine suivante: Dei benevolum amorem experta, ce qui signifie: qui a expérimenté (ou éprouvé) l'amour bienveillant de Dieu. Cette traduction, correcte, diffère de l'expression habituelle: gratia plena sur laquelle est échafaudée toute la Mariologie catholique.

En fait, l'expression pleine de grâce est en grec plèrès kharitos. On la trouve deux fois dans le Nouveau Testament; elle s'applique à Jésus en Jean 1.14 et à Etienne en Actes 6. 8.

Ainsi donc, toute une doctrine catholique se fonde sur une traduction controuvée...

*

 JESUS ou MARIE

Pour le chrétien, il n'y a qu'un seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ (1Tim. 2. 5).

Et c'est aussi Jésus-Christ – et non pas Marie 26 comme le proclament les invocations qui lui sont adressées – qui est

leur avocat auprès du Père

(1 Jean 2.1)

leur intercesseur auprès de Dieu

(Rom. 8.34 ; Héb. 7.25)

le trône de la grâce 26

(Héb. 4.16; Ja. 1.17)

le modèle de pureté

(Jean 8.46)

le détenteur de la Puissance

(1 Cor. 1.24)

la source de la clémence

(1 Tim. 1. 16)

le Fidèle par excellence

(2 Thess. 3.3 ; Apoc. 19.11)

le seul Juste

(Actes 3. 14 ; Apoc. 16.5)

Le principe de la Sagesse

(1 Cor. 1.24)

La cause de la joie

(Jean 15.11 et 16.24)

la Porte du ciel

(Jean 10.7 et 9)

l'Etoile du matin

(2 Pi. 1.19; Apoc. 22.16)

le salut des infirmes

(Matth. 8.17)

le refuge des pécheurs

(Matth. 11.28 à 30)

le consolateur des affligés

(2 Cor. 1.5)

le secours des chrétiens

(Matth. 15.25)

le Roi des Anges

 (Col. 2.10; Héb. 1.4)

le Roi du Ciel

 (Matth. 28. 18)

le Prince de la paix

 (Col. 3.15)

leur Sauveur parfait 27

(Héb. 7.25)

D'après les litanies, les prières et la doctrine catholiques tous ces privilèges et rôles seraient détenus par Marie, alors que l'apôtre Pierre a bien spécifié que :

« Il n'y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné parmi les hommes (que celui de Jésus-Christ), par lequel nous devions être sauvés » (Actes 4.12).

 


Conclusion

Tout ce qui ne procède pas d'un conviction est péché.
(Rom. 14. 23, Maredsous)

Il n'a pas été possible d'analyser en détail toutes les divergences entre les diverses traductions et toutes les notes explicatives litigieuses. Mais on a pu se rendre compte que la Tradition ou les Dogmes ont établi des croyances qui ne concordent pas avec le Nouveau Testament. Souvent les notes proposées par les traducteurs catholiques tordent le sens des Ecritures, dans une tentative d'autojustification, ne s'appuyant que sur la tradition.

Les traductions récentes que nous vernons d'analyser, rejoignent trés souvent les traductions qui ont eu notre préférence.

Les révisions des éditions catholiques sont devenues quelquesfois plus conformes au texte grec.

Ces nouvelles versions ne permettent plus d'accréditer le dogme de la virginité perpétuelle de Marie (NJER, Mt 1:25)

Elles soulignent l'intransmissibilité du saceredoce de Jésus-Christ (TRI, PDB, OSTR, TDB, BFC - Héb. 7.24) ébranlant certaines doctrines catholiques, et reconnaissent que les croyants peuvent avoir l'assurance de leur Salut (1 Co. 15.2).

 

ECRITURE ET TRADITION

Qu'une tradition apostolique orale ait existé, cela est incontestable. Mais qu'elle ait pu se transmettre sans altération pendant des siècles cela se conçoit difficilement. Pour preuve, il suffit de rappeler que le contenu de la tradition des Eglises romaines diffère de celui des Eglises orthodoxes, par exemple en ce qui concerne la primauté de Pierre et l'origine des frères de Jésus. De plus, certaines traditions très anciennes sont actuellement désavouées et leur précarité est plus ou moins reconnue, ainsi pour la tradition du ministère de 25 ans de Pierre à Rome.

Aujourd'hui, il n'est donc plus possible de reconnaître dans l'ensemble des traditions celles qui sont authentiquement apostoliques. Etant suspectes, il est donc illicite de s'appuyer sur elles pour interpréter un texte de l'Ecriture. Les affirmations contingentes de la Tradition ne peuvent que ternir ou tordre les affirmations certaines, absolues de l'Ecriture.

La Révélation de l'Ancien Testament nous est parvenue par les Ecritures, et non par la tradition orale. Jésus s'est très souvent référé à l'Ancien Testament, de même que les évangélistes et les épistoliers. (Voyez les tableaux suivants).

Jamais, pour fonder leurs doctrines, ils n'ont fait appel à la tradition que Jésus condamne, et surtout lorsqu'elle annule la Parole de Dieu (Matth. 15.6 et 7 ; Marc 7.5 à 13).

 

Liste des Versets du Nouveau Testament qui en réfèrent à l'Ancien Testament ou à des vérités scripturales de l'Ancien Testament.

Evangile

* = Les passages ou c'est notre Seigneur qui se réfère à l'Ecriture

Matth.

1.22
2.15
2.17,18
2.23
3. 3
4. 4*
4. 7*
4.10*
4.14
5.21*
5.27*
5.31*
5.32*
5.38*
5.43*
8.17
9.13*
11.10*'
12. 7*
12.17-21
12.39*
13.14
13.35
15. 4*
15. 7,9*
16. 4*
19.4-6*
19.18,19*
21.4,5
21.13*
21.16
21. 42*
22.23
22.29,31*
22.37*
22.39*
22.43*
24.15*
26. 31*
26.56
27. 9
27.35
27.46*  

Marc

1. 2
2.44*
3.25*
4.12
7.6,7*
7.10*
9.12,13*
10.3-8*
10.19*
11. 17*
12.10*
12. 24*
12.26*
12.29-31*
12.36*
14. 27*
14. 62*
15.34*

 

Luc

1.70
2. 22,23
3.4-6
4. 4*
4. 8*
4.12*
4. 17-19
4. 25, 26*
6.3,4*
7.27*
8.10*
10.12*
10.26*
11. 29-32*
12. 51*
16.29-31*
17.26-29*
18. 20*
19.46*
20.17*
20.37*
20.42*
22. 37*
23.56 *
24.25*
24.27*
24.44-46*

Jean

1.23,24
1.45
2.17
2.22
3.14*
4.25
5.39*
5.47*
6.31
6.32*
6.45*
6.49*
7,19*
7.38*
7.42
8.17*
10.34,35*
12.14
12.38-41
13,18*
15,25*
17,12*
19,24
19,28
19.36,37
20.9

ACTES ET EPITRES

Actes

1.16
1.20
1.16
1.20
2.16-21
2.25
2.30.31
2.34
3.21
3.22-25
4.11
4.25
7.2-50
8.32, 33
10.43
13.16-23
13.33-35
13.40,41
13.47
15.15-18
17.2,3
17.11
18.24-28
23.5
24.14
26.22
28.25-27

Rom.

1.17
2.24
3.4
3.10-19
3.20,21
4.3
4.6-8 
4.17
4.23
7.7
8.36
9.7-15
9.17
9.25
9.33
10.5-8
10.11
10.15
10.16
10.18
10.19
10.20-21
11.2-4
11.8-10
11.26
11.34-35
12.19,20
13.9
14.11
15.2,3
15.9
15.10,11
15.12
15.21
16.26

1 Cor.

2.16
3.19-20
5.13
6.16
9.9-10
10.7-10
14.21
15.3
15.25
15.45
15.54-55

 

2 Cor.

4.13
6.2
6.16-18
8.15
9.9
 

Gal.

3.6
3.8-10
3.13
4.22
4.27
4.30
5.14

Eph.

4.8
5.31
6.23 

1Tim.

5.18

 

2Tim.

3.16

Heb.

3.15
4.3
5.5,6
6.13,14
7.1
7.17
7.21
8.8-12
9.19,20
10.5-8
10.12,13
10.15-17
10.30
10.37,38
11.4-38
12.5,6
12.12,13
12.20
12.26
13.5,6

 

 

Ja.

2. 8
2.23
4.5,6

 

 

1Pi.

1.10
1.16
1.24,25
2.6-8
2.22-25
3.6
3.10-13
4.18
5.5

2.Pi.

2.22
3.16 

Ne sont mentionnés ici que les textes qui font un appel explicite à l'Ancien Testament et non pas ceux, très nombreux, qui en font seulement des emprunts, et particulièrement abondants dans le livre de l'Apocalypse (plus de 200!).

Pourquoi la Révélation du Nouveau Testament aurait-elle un mode de transmission différent de celle de l'Ancien Testament?

Si Dieu avait choisi, pour la transmission de l'Evangile, la voie orale, pourquoi alors, l'Esprit-Saint aurait-il poussé les évangélistes et les épistoliers à écrire? N'est-ce pas pour conserver un témoignage écrit inaltérable pour la postérité?

Et pourquoi ce même Esprit-Saint aurait-il enjoint à l'Eglise d'établir le Canon des Ecritures du Nouveau Testament, si ce n'est pour dresser une barrière à toutes les prétendues traditions apostoliques?

S'il avait été dans les desseins de Dieu de nous transmettre les vérités évangéliques non seulement par les Ecritures mais encore par voie de tradition orale, quel sens faut-il attribuer aux avertissements de l'Esprit-Saint contre toute déformation de la doctrine primitive?

Voici quelques passages particulièrement significatifs à méditer.

Matth. 15.6 et 7 :
Vous annulez ainsi la Parole de Dieu au profit de votre tradition. Hypocrites, Esaie a bien prophétisé sur vous, quand il a dit...

Luc 1.3 et 4 :
Il m'a aussi semblé bon, après avoir fait des recherches exactes sur toutes ces choses depuis leur origine, de te les exposer par écrit d'une manière suivie, excellent Théophile, afin que tu reconnaisses la certitude des enseignements que tu as reçus.

Jean 20. 31:
Mais ces choses ont été écrites afin que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son nom.

1 Cor. 4.6:
C'est à cause de vous, frères, que j'ai fait de ces choses une application à ma personne et à celle d'Apollos, afin que vous appreniez en nos personnes à ne pas aller au-delà de ce qui est écrit, et que nul de vous ne conçoive de l'orgueil en faveur de l'un contre l'autre.

1 Cor. 15.1 et 2:
Je vous rappelle, frères, l'Evangile que je vous ai annoncé, que vous avez reçu, dans lequel vous avez persévéré, et par lequel vous êtes sauvés, si vous le retenez tel que Je vous l'ai annoncé; autrement vous auriez cru en vain.

2 Cor. 11.13 et 14:
Ces hommes-là sont de faux apôtres, des ouvriers trompeurs, déguisés en apôtres de Christ. Et cela n'est pas étonnant, puisque Satan lui-même se déguise en ange de lumière.

2 Cor. 13.5:
Examinez-vous vous-mêmes, pour savoir si vous êtes dans la foi; éprouvez-vous vous-mêmes.

Gal. 1.7 à 9:
Non pas qu'il y ait un autre Evangile, mais il y a des gens qui vous troublent, et qui veulent renverser l'Evangile de Christ. Mais, quand nous-même, quand un ange du ciel annoncerait un autre Evangile que celui que nous vous avons prêché, qu'il soit anathème! Nous l'avons dit précédemment, et je le répète à cette heure: si quelqu'un vous annonce un autre Evangile que celui que vous avez reçu, qu'il soit anathème!

Ce passage établit solennellement que l'ère de la révélation est close. Daniel-Rops même le reconnaît (« Qu'est-ce que la Bible », p. 176) : « Avec les dernières lignes des Epîtres, avec les derniers cris d'appel de l'Apocalypse se clôt le Livre: le message a été totalement délivré, la Révélation est complète ». Après la mort des apôtres, « l'Eglise vivra dans la lumière et la vie de l'Esprit-Saint, mais sans enrichir de révélations nouvelles le dépôt qu'elle a reçu des apôtres » (Robert-Tricot, « initiation biblique », p. 717).

Col. 2.8: Prenez garde que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par une vaine tromperie, s'appuyant sur la tradition des hommes, sur les rudiments du monde, et non sur Christ.

2 Tim. 1.13:
Retiens dans la foi et dans la charité qui est en Jésus-Christ le modèle des saines paroles que tu as reçues de moi.

2 Tim. 3.14:
Toi, demeure dans les choses que tu as apprises, et reconnues certaines, sachant de qui tu les as apprises.

Tite 1.9:
(Que l'évêque soit) attaché à la vraie parole telle qu'elle a été enseignée, afin d'être capable d'exhorter selon la saine doctrine et de réfuter les contradicteurs.

Tite 1.13 et 14:
C'est pourquoi reprends-les sévèrement, afin qu'ils aient une foi saine, et qu'ils ne s'attachent pas à des fables judaïques et à des commandements d'hommes qui se détournent de la vérité.

1 Pi. 1.25:
Mais la parole du Seigneur demeure éternellement. Et cette parole est celle qui vous a été annoncée par l'Evangile.

2 Pi. 3.16:
C'est ce qu'il (Paul) fait dans toutes les lettres, où il parle de ces choses, dans lesquelles il y a des points difficiles à comprendre, dont les personnes ignorantes et mal affermies tordent le sens, comme celui des autres Ecritures, pour leur propre ruine.

1 Jean 4.1 :
Bien-aimés, n'ajoutez pas foi à tout esprit; mais éprouvez les esprits, pour savoir s'ils sont de Dieu, car plusieurs faux prophètes sont venus dans le monde.

2 Jean 9 :
Quiconque va plus loin et ne demeure pas dans la doctrine de Christ n'a point Dieu; celui qui demeure dans cette doctrine a le Père et le Fils.

Jude 1.3:
Bien-aimés, comme je désirais vivement vous écrire au sujet de notre salut commun, je me suis senti obligé de le faire afin de vous exhorter à combattre pour la fol qui a été transmise aux saints une fois pour toutes.

Apoc. 22.18 et 19 :
Je le déclare à quiconque entend les paroles de la prophétie de ce livre: Si quelqu'un y ajoute quelque chose, Dieu le frappera des fléaux décrits dans ce livre; et si quelqu'un retranche quelque chose des paroles du livre de cette prophétie, Dieu retranchera sa part de l'arbre de la vie et de la ville sainte, décrits dans ce livre.

Si la Tradition (qu'on a aussi définie comme la conscience de l'Eglise animée par le Saint-Esprit) ne concorde pas avec les Ecritures, ne faut-il pas en conclure qu'elle n'était qu'humaine. et qu'elle tombe ainsi sous la condamnation du Christ (Matth. 15.3 à 7) ?

Le retour à la seule source absolument authentique, la Bible, ne semble-t-elle pas s'imposer?

Les apologistes de la Tradition objecteront peut-être, « au nom de l'Histoire ». qu'il n'est pas possible de dépouiller le christianisme de toutes les parures dont il s'est chargé en deux millénaires (malgré l'exemple laissé par le Roi Josias en 2 Rois 22.10 à 23.25). Ce n'est pas dans le dépouillement des traditions et le retour au Livre de Dieu qu'ils voient se réaliser l'unité des chrétiens, mais dans une évolution progressive et convergente.

On nous dira aussi que l'unité avait existé, avant la Réforme, pendant 15 siècles, au sein de l'Eglise catholique, et que prêcher le retour aux seules Ecritures, c'est méconnaître ce long passé d'unité. Telle, en effet, apparaît généralement l'Histoire de l'Eglise. Mais on oublie le plus souvent que le schisme d'Orient est survenu en 1053, donc cinq siècles avant la Réforme, et ceci après sept siècles environ de dissensions entre Rome et l'Orient (Histoire de l'Eglise ", par Dom C. Poulet, tome I, p. 119).

EGLlSES DU NOUVEAU TESTAMENT

Et l'on ignore généralement que dès le début du christianisme et jusqu'à nos jours existent des Eglises évangéliques, fidèles au Nouveau Testament, formées d'assemblées locales, présidées par des anciens (voir « L'Eglise ignorée ", par E. H. Broadbent, Edit. Je Sème, Nyon en Suisse).

Et la Réforme, en fait, n'a été qu'un immense mouvement de retour vers ce christianisme primitif.

Ces Eglises primitives, tout en étant constituées d'assemblées locales indépendantes, sont unies entre elles parce qu'elles ont le même chef: Jésus-Christ (Eph. 1.22), la même doctrine: la Bible, le même Conducteur (1 Cor. 2. 12 ; Jean 7.39 ; Actes 2.17, 38 et 39) : l'Esprit-Saint, qui nous remémore l'appel de notre Seigneur:

 —

Nous ne pouvons que réinviter nos lecteurs à se laisser convaincre par les Ecritures, seules sources de Vérité (Jean 17.17) qui affirment que Jésus-Christ, mort à la croix et ressucité, est le seul chemin qui conduise à Dieu (Jean 14.6), le seul Médiateur entre Dieu et les hommes (1Tim 2.5), le seul Sauveur (Ac. 4.12) et qui accorde le Salut à quiconque se repent et croit en lui (Marc 1.15; Jean 3.16; Eph. 2.8).

C'est lui que :

Dieu ... a souverainement élevé, et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père. (Philipiens 2.9-11)

 —

C'est lui qui dit :

« Venez à moi » (Matth. 11.28)

« Quiconque est de la vérité écoute ma voix » (Jean 18.37). »

« Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jean 14.6). »

Robert SCHRŒDER


Du même auteur:


Notes:

1 Pour tout supplément d'information, veuillez nous écrire.
Ecrire à R. Schrœder.

2 Sur « la Nouvelle Naissance », voir plus haut le chapitre consacré à la Nouvelle Naissance. Voir aussi note n° 6

3 La recherche des passages parallèles se tait à l'aide d'une Concordance.
Pour faire ce travail, on s'est surtout servi des ouvrages suivants:
« Concordance des Saintes Ecritures », Soc. Bibl. Auxili.. du canton de Vaud, Lausanne. »
« Concordantiae Novi Testamenti Graece », D. Dr A. Schmoller, Privil. Württ. Bibelanstalt, Stuttgart.
« Stichwort-Konkordanz », dans « Eine Konkordante Wiedergabe, Neues Testament », Konkordanter Verlag, Albert Blaettler, Adllswil-Zürich (Suisse).

4 Les traductions protestantes ne comportent généralement pas de notes doctrinales au bas des pages, tout au plus quelques explications de nature géographique ou des renvois à des passages parallèles.

5 Sauf indication particulière, toutes nos citations bibliques sont empruntées à la traduction Segond. 

6 Sur la Nouvelle Naissance, consulter les Cahiers « Evangile » N° 41 et surtout 43 de la Ligue Catholique de l'Evangile.

7 Voir « A concordance to the septuagint » par Edwin Hatch M. A., D. D. and henry A Redpath, M. A. – Akademische Druck – und Verlagsanstalt Graz – Austria (1954, copie photomécanique de l'édition d'Oxford de 1897).

8 Le schisme d'Orient, survenu en 1053, résultait de la non reconnaissance de la primauté romaine par l'Eglise d'Orient, malgré les « fausses décrétales ».

9 Les livres des Maccabées, ainsi que ceux de Tobie, de Judith, de la Sagesse, de l'Ecclésiastique, de Baruch, la lettre de Jérémie, certains fragments de Daniel et d'Esther ne se trouvent pas dans l'original hébraique de la Bible, mais seulement dans la version grecque des Septante (LXX). Ces livres, appelés deutérocanoniques par les Catholiques, parce que leur canonicité et leur caractère inspiré étaient mis en doute par l'Eglise primitive, sont considérés comme apocryphes par les Juifs et les Protestants.

10 L'Eccléslastique, écrit d'abord en hébreu fut traduit en grec et est ainsi entré dans les Septante. En 1896, on a trouvé des fragments de quatre manuscrits en hébreu équivalant au 4/5 du livre.

11 Voir. Konkordanz zum Hebräischen Alten Testament, G. Lisowsky. 1958, Priv. Württ. Bibelanstalt Stuttgart.

12 Edit. Delusseux, 1726. Paris, p. 19.

13 Voir. Patrologia latine., édit. J.-P. Migne, 1896, tome 77, p. 891.

14 Voir « Concordantiae Novi Testamenti Graeci » par Dr. A. Schmoller. Prlv. Württ. Bibelanstalt, Stuttgart.

15 Voir Stichwort-Konkordanz, dans « Eine konkordante Wiedergabe » « Neues Testament », Konkordanter Verlag, Albert Blaettler, Adliswil-Zürich (Suisse).

16 Voir « Veteris Testamenti Concordantiae ». Hebraicae atque Chaldaicae; Salomon Mandelkem, Lipsiae, 1896.

17 Une étude sur la Tradition se trouve en conclusion.

18 Gen. 4.8,9; 20.5,13; 24.29 ; 25.26 ; 27.29, 40,41, 42, 43, 44; 43.29 ; 48. 6 ; 49.5, 8; Lév. 25.25, 35, 39; Deut. 15.7, 9, 11 ; 25.5, 6: 13.6: Juges 9.1.3; 1 Sam.17.28; 22.1; 1 Chrono 7.22; Provo 18.19, 24; 19.7; 27.10.

19 Deut. 33.16; 2 Sam. 13.12; Gen. 37.4, 26, 27 ; 42.6, 20; 44.19, 26; 45.1, 4 ; 48.22 ; 49.26 ; Juges 8. 19 ; 9. 5.

20 Gen. 13.8 ; 14. 14, 16 ; 29. 15 ; Lév. 10.4.

21 1 Chrono 23.22

22 Gen. 12.13 : 20.2 : 24.59, 60 ; 26.7 : 30.1 : 34.14 ; Ex. 2.4 ; Lév. 18.9; 21.3; Nomb. 6.7; Ez. 22.11 ; 44.25.

23 Gen. 20.12: Deut. 27.22; 1 Chrono 2.16.

24 Job 17.14; Provo 7.4; Ez. 16.46,46, 49, 51, 52, 61 ; 23.11, 32, 33 : Os. 2.3.

25 « Ce que l'auteur sacré affirme, énonce, insinue, doit être regardé comme affirmé, énoncé, insinué par l'Esprit-Saint » (Commission biblique, décision du 18 juin 1915, cité par Daniel-Rops « Qu'est-ce que la Bible? » p.76).

26  Marie est, pour le pape Benoit XV « Médiatrice de toutes les grâces auprès de Dieu ». Pour Pie XI, « c'est Dieu qui a voulu que nous ayons tout par Marie ». Cité par Louis Ott, « Précis de Théologie dogmatique", p. 305. Pour Pirot-Clamer (tome XI, 1ère partie, p. 44) : « Toutes les faveurs nous viennent de Marie ».

27 Dans sa bibliographie, p. 307, . Précis de Théologie dogmatique, Louis Ott indique, non seulement sept ouvrages où Marie est qualifiée de « médiatrice », mais encore six ouvrages, où elle figure comme « corédemptrice ».